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40 ans d’ « in-game advertising » : un marché de 7.6 Milliards de $ en 2022

Le « in game advertising » ou publicité intégrée dans les jeux vidéo existe déjà depuis la fin des années 70. En plus de 40 ans, les technologies et pratiques publicitaires ont bien évolué, avec désormais l’avènement du « programmatic in game advertising ». Alors on fait le point sur l’histoire et les tendances du placement publicitaire des jeux vidéo et le glissement de ces stratégies vers le « metaverse ».

in game advertising
Photo : Jazmin Tabuena via Corelens / Canva


Pourquoi le jeu vidéo intéresse les annonceurs ?

Un peu de contexte avant d’explorer les stratégies d’ « in game advertising ». Il y aurait aujourd’hui 3 milliards de gamers dans le monde, pour un marché global du jeu vidéo qui devrait atteindre 222 milliards de dollars en 2022. Le développement des jeux vidéo sur mobile a permis de démocratiser ces usages, sans achat de consoles ou pc.

Les jeux mobiles représenteraient aussi plus de 61% du marché. (détails BusinessOfApps) La pandémie a encore accentué ce phénomène du jeu mobile, comme nous l’expliquions dans notre article de janvier 2021 « la consommation de jeu vidéo et mobile explose ».

La taille du marché du gaming mobile intéresse les annonceurs, mais surtout la possibilité de toucher des cibles nouvelles, plus féminines et d’âges variés. Ainsi en 2022 aux États-Unis, près de 50 % des jeux mobiles les plus populaires en termes de dépenses des consommateurs étaient destinés aux joueuses. Et les cibles de clientèle de la génération X et des baby-boomers ont aussi vu leurs dépenses pour les jeux mobiles augmenter. (détails via Mashable, étude Data.ai et IDC)

(source : Data.ai et IDC : https://www.data.ai/en/insights/mobile-gaming/2022-gaming-spotlight-report/ )

On comprend donc pourquoi 93% des acheteurs media auraient l’intention de piloter des stratégies d’ « in-game advertising » d’ici 2025 (étude Admix et Atomic Research de 2021, sur les marchés US et UK). Le marché du « in game advertising » qui représente 7.6 milliards de $ en 2022 devrait ainsi atteindre 17.6 Milliards d’ici 2030, soit 11% de croissance annuelle. (source Xenoss, société adtech américaine).

Mais 31% de ces annonceurs déclarent aussi ne pas savoir par où commencer. Certains ont encore en tête des stéréotypes sur les « gamers » et sur les jeux vidéo comme étant un environnement hostile aux marques. C’est pourquoi ces dernières années, la plupart des grandes agences internationales ont anticipé ce besoin en créant des divisions spécialisées dans les jeux vidéo et l’eSport. On peut ainsi citer Dentsu (Dentsu gaming), GroupM, Omnicom (Level Up OAC), Publicis Sport & Entertainment UK (Publicis Play), DDB Worldwide (FTW/For the win).


Qu’est-ce que l' « in game advertising » ?

La publicité « in game », intégrée dans un jeu vidéo, n’est pas une technique nouvelle puisque le premier jeu qui l’a utilisé date de 1978. Il s’agit alors d’une publicité pour un jeu vidéo intégré dans un autre jeu vidéo, avec la promotion de « Pirate Adventure » dans le jeu « Adventure land ».

Il y a 40 ans, en 1982, un annonceur « traditionnel » fait son arrivée dans le jeu de course « Pole position » de Namco, sur Atari 2600. Les panneaux publicitaires en bord de piste étaient de la « publicité statique » mais différente selon les pays. Ainsi les japonais avaient des panneaux du cigarettier Philip Morris, avec la marque Marlboro, enlevés dans la version américaine du jeu. Voici un extrait vidéo pour les nostalgiques.

D’autres placements produits « historiques » : les sucettes Chupa Chups intégrées comme éléments du jeu « Zool » sur Amiga (1992), Barack Obama sur un panneau publicitaire du jeu EA « Burnout Paradise » (2008), ou encore un camion de chips Doritos dans le jeu « GhostBusters » (2009). (plus de détails dans cet article du bloggeur Neil Hugues)


Publicité statique, dynamique et advergaming

On distingue donc dans les jeux vidéo la « publicité statique » (avec l’exemple traditionnel des panneaux d’affichage) de la « publicité dynamique » (de nouveaux contenus, scénarios ou objets intégrés pour des opérations spéciales).

En exemple français de publicité in game « dynamique », on peut citer la collaboration entre le maroquinier Longchamp et PokemonGo, pour la Fashion Week Paris 2020. Les joueurs pouvaient ainsi équiper leurs avatars PokemonGo avec des sac à dos de la marque Longchamp. Il était aussi possible de retrouver en boutique de véritables sacs décorés de personnages emblématiques du jeu comme Pikachu. Plus de détails dans notre article « Longchamp, 20 ans de digitalisation jusqu’à PokemonGo ».

Cet article d’HEC Montréal signale aussi la valeur des contenus créés par des fans pour leurs jeux, comme les « mods » IKEA pour intégrer les meubles de la marque dans le jeu Les Sims 4. Ces créations de développeurs indépendants (ou « modders ») ne sont pas des collaborations officielles avec Ikea. Mais elles sont tolérées par la marque qui bénéficie ainsi de publicité gratuite.


Le cas particulier du « advergaming »

Enfin ces approches publicitaires ne doivent pas être confondues avec le « advergaming », quand les marques développent elles-mêmes leurs propres mini-jeux à des fins marketing. Une stratégie qui s’apparente à un développement de jeu en « marque blanche ».

Une des références historiques en advergaming est Burger King avec ses « King Games » créés par le studio Blitz Arcade. De novembre à décembre 2006, à l’achat d’un menu les clients américains pouvaient pour 3.99$ acquérir un jeux vidéo pour Xbox/Xbox 360. Ces 3 jeux, PocketBike Racer, Sneak King, et Big Bumpin', se sont écoulés à 2.5 millions d’exemplaires et ont désormais un statut « culte » auprès des fans.

(King Games, source Reddit)


La publicité programmatique au sein des jeux vidéo

La publicité dynamique in game peut être programmatique, à travers une plateforme d’achat de bannières ou vidéo. Parmi les nombreux acteurs du marché, citons les plateformes Display & Video 360 (Google), Anzu et Bidstack. Elles proposent toutes la géolocalisation démographique et contextuelle des joueurs pour un ciblage publicitaire pertinent. Plus de détails sur ces plateformes et une études de cas sur le site de l’agence Dialekta.

(source Dialekta, collaboration entre Anzu et les céréales Cap’n Crunch dans le jeu Axis Football 2020)

Les enjeux de protection de la vie privée ont aussi un impact sur le ciblage des campagnes. En effet depuis avril 2021, Apple a déployé dans iOS 14.5 la fonctionnalité « App Tracking Transparency » qui permet aux utilisateurs de limiter le pistage de leurs applications.

De nombreux acteurs planchent donc sur des alternatives au IDFA (IDentifier For Advertisers) d’Apple ou se tournent plutôt vers l’univers Android en pleine expansion. Ainsi d’après Pubmatic, les budgets publicitaires mobiles se déplacent vers les appareils Android. Sur Q2 et Q3 2021, la part des budgets consacrés aux applications mobiles était passée de 54 % à 63 % sur Android, tandis qu'elle avait diminué sur iOS, passant de 46 % à 37 %.

Mais les consommateurs ne seraient finalement pas si réfractaires au « tracking » si il permet d’accéder à des jeux gratuits ou des avantages au sein des jeux (comme des bonus ou des armes spéciales). Ainsi comme l’explique Katie Madding, chief product officer de la plateforme d’analytique Adjust : « Les taux de consentement pour les jeux « hyper casuals » (ndlr : comme Candy Crush ou Clash of Clans) sont comparativement élevés, car les utilisateurs de ces jeux ont une compréhension naturelle des avantages de la publicité ciblée » (source Gamesindustry.biz, où Adjust parle d’un taux d’acceptation global de 26%, et de 31% pour les jeux, à Q1 2022).

Connaitre le contexte du joueur au sein d’un jeu est aussi un élément important pour la pertinence d’une bannière ou vidéo publicitaire. Katie Madding : «  il est important de faire correspondre la bonne publicité avec les bons utilisateurs - et les bons moments dans le jeu ou dans votre parcours utilisateur. Vos données peuvent vous indiquer quels joueurs sont les plus susceptibles de s'engager avec quelles publicités et à quels moments du jeu chaque type de publicité fonctionne le mieux ».


Le glissement des publicités vers le metavers

Le métavers étant pour le moment surtout visible à travers des plateformes de jeu (comme Roblox, PokemonGo ou même Fortnite), on comprend que les annonceurs réfléchissent déjà à y transposer leurs stratégies publicitaires. Le futur du « in game advertising » se jouera donc aussi sur ces nouveaux territoires.

En attendant les marques testent déjà des opérations évènementielles dans le metaverse. Parmi les exemples décryptés par Viuz : Gucci et Ralph Lauren dans la plateforme Roblox, et les mondes de la mode et de la musique dans PokemonGo, Seloger pour des visites d’appartements dans la plateforme Oncyber, Carrefour dans la plateforme the Sandbox.

Un rapport McKinsey de juin 2022, « Value creation in the metaverse » nous éclaire sur les marchés porteurs et donc les annonceurs qui pourraient pousser en faveur du métavers :  « De tous les moteurs potentiels de l'impact économique du métavers, le e-commerce est le plus important. Nous estimons qu'il pourrait avoir un impact sur le marché de 2 000 à 2 600 milliards de dollars d'ici 2030. Une contribution bien supérieure à ce que le métavers pourrait apporter à des secteurs comme l'enseignement universitaire virtuel (impact estimé entre 180 et 270 milliards de dollars d'ici 2030), la publicité (impact de 144 à 206 milliards de dollars) et le gaming (108 à 125 milliards de dollars). »

Selon ce même rapport, environ 79 % des consommateurs actifs dans le métavers y ont déjà acheté quelque chose. Les articles les plus populaires étant des achats dans le jeu, du maquillage virtuel, des produits du monde réel et des NFT.

Comme le résume Jane Lacher, head of growth à GroupM : «  Ce marché (du metaverse) sera à la fois gros et de niche. Niche dans la mesure où il s'agit d'une expérience virtuelle dans des mondes virtuels, gros dans la mesure où vous avez toute une génération qui, dans une décennie, sera consommatrice de biens virtuels (virtual-first consumers) ». (source Metanews.com)


Des publicités « natives » au métavers

Le marché de masse est encore loin. Mais le métavers devrait représenter une part plus importante des placements et des budgets publicitaires à mesure que les consommateurs passent plus de temps dans le métavers par jour (selon McKinsey jusqu'à 4-6 heures/jour en convertissant le temps passé en ligne !).

De nouvelles expériences virtuelles « de masse » via des plateformes de jeu populaires (notamment les concerts) devraient aussi attirer le grand public. Enfin, on peut s’attendre à l’arrivée de nouveaux types de publicités plus immersives, « natives » au métavers (par exemple, la recherche visuelle, les panneaux d'affichage virtuels).

Parmi les nouveaux territoires à explorer pour les marques : le marché des vêtements et accessoires pour avatars. Une opportunité pour des placements publicitaires mais aussi pour de nouvelles sources de revenus de la vente d’articles virtuels.

C’est l’analyse d’Irene-Marie Seelig, cofondatrice et directrice générale d'AnamXR (plateforme e-commerce en webVR), citée dans le rapport McKinsey : « Le comportement des consommateurs a largement évolué vers l'adoption de personas numériques, mais de nombreuses marques doivent encore amener une réponse à ce besoin. Cela ouvre un tout nouveau modèle de revenus pour les marques qui peuvent fournir des actifs numériques comme des vêtements, par exemple ».

Séverine Godet

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