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Comme un besoin de ré-incarnation

Sommes-nous à l’aube d’un nouveau grand cycle ? Plusieurs signes, faibles et forts, semblent l’indiquer. Ce qui se passe dans le monde tech, par ailleurs, est très révélateur. De grandes et moins grandes entreprises sont bousculées, tandis que de nouvelles innovations, et au premier chef l’intelligence artificielle générative, provoquent une nouvelle ruée vers l’or. Tout cela pourrait être transitoire, le temps pour les uns et pour les autres de s’adapter. Mais il pourrait tout aussi bien s’agir de mutations plus  profondes, avec une recomposition du paysage tech voire une nouvelle grande vague d’innovations et de ruptures. 

Pour y voir plus clair, avons détecté 4 tendances qui refaçonnent nos vies. Nous explorons aujourd'hui la 3ème : ce besoin de ré-incarnation

Voir la les tendances précédentes

Tendance 1 : l'impact de l'IA générative

Tendance 2 : la grande délinéarisation

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Nous avons récemment eu une surprise de taille. A l’occasion de notre dernière conférence Marketing Remix en novembre 2022, nous nous sommes intéressés aux moyens dont disposent les marques pour créer du lien avec les consommateurs. Nous avons mené une étude avec Yougov auprès de la population française, en pensant en premier lieu aux leviers nombreux et puissants du marketing digital. La surprise :  alors même que les marques ont à leur disposition un nombre chaque fois plus diversifiés et raffinés de leviers digitaux, les consommateurs préfèrent… le magasin. 


Le magasin, fait de société

Les consommateurs aiment en effet une marque

  • d’abord parce que ses produits sont en magasin (78%).
  • Et ce, avant toute autre considération : avant les programmes de fidélité (41%), bien plus que parce qu’elles sont en ligne (38%) et bien bien plus parce que qu’elle partage des informations régulièrement (15%) 

De même, pour créer du lien avec le consommateur les Français considèrent 

  • qu’une marque doit privilégier le service client (81%) et le magasin (76%). 
  • Significativement, l’automatisation ou l’intelligence artificielle sont à l’inverse rejetées par 66% des individus. Quant au metaverse,  il est encore méconnu par 30% des Français, mais parmi ceux qui le connaissent, 70% le rejettent ! 

Le magasin, c’est la possibilité de toucher le produit, d’avoir un contact humain, de croiser d’autres personnes, la nécessité de se déplacer pour aller faire les courses. Le magasin a, certes, ses irritants, mais il n’apparaît plus comme un lieu vénal, il occupe aussi une fonction sociétale.

Le covid nous a redonné le goût du magasin et montré tout son intérêt. Le goût du magasin s’inscrit dans une tendance plus large. C’est un refus de retourner dans le monde trop digital, dont la vie pendant la pandémie pourrait être une annonce. Deux courants s’opposent et s’attirent comme des contraires. D’un côté le développement du digital s’accélère, notamment dans des formes immatérielles de plus en plus poussées, à la fois enthousiasmantes et inquiétantes (l’intelligence artificielle, le virtuel). De l’autre côté, à contre-courant, se fait d’autant plus sentir le besoin de contenus concrets, en chair et en os, le besoin de vie réelle. 


Même les digital natives

Une étude d’Octolis, une entreprise spécialisée dans les solutions data (étude que nous allons bientôt publier), montre des résultats intéressants. L’étude concerne les stratégies des fameuses DNVB (Digital Native Vertical Brands), ces jeunes entreprises imprégnées de culture digitale. Le contexte de concurrence exacerbée complique parfois leur développement, au points pour certaines, et pas les moins emblématiques comme Made.com, de devoir fermer boutique. Étonnamment, là-encore, l’étude révèle que les entreprises qui s’en sortent le mieux sont celles qui ne se contentent pas que de dispositifs digitaux mais ouvrent des magasins. Les entreprises omnicanales - qui s’appuient sur une présence en ligne et en physique via des boutiques ont une croissance structurelle plus importante que celle des pure players (47,2 % vs 33,1 %). Les DNVB ciblent pourtant un public plutôt jeune, lui-même empreint de culture digitale. Mais même sur cette cible, la présence de magasins est un avantage, elle constitue un autre levier, elle permet de ne pas dépendre de leviers digitaux, qui rapidement satures par la concurrence, créent des coûts d’acquisition élevées. Le magasin est également le meilleur moyen de lutter contre une indifférenciation digitale, un moyen de sortir de la masse. Le magasin permet de créer un lien vraiment direct.


L’expérience humaine

Le besoin de ré-incarnation va plus loin que le magasin. Il s’inscrit dans un désir plus large de vie en chair et en os, de présence physique. Mais plus largement, il renvoie à la nécessaire considération de la personne dans toutes ses facettes. Or, le marketing et la publicité ont tendance à s'intéresser à des cibles, à ne viser que des “eyeballs”… Une étude d’Accenture révèle que la transformation des entreprises ne suffit plus, la course à la technologie n’empêche pas 95 % des cadres de 1700 grandes entreprises de considérer que l’évolution des clients est plus rapide que celle de l’entreprise. 

Accenture enjoint les marques à adopter une démarche qu’il qualifie de Life-centric. Il s’agit d’appréhender les individus dans toutes leurs facettes, dans leur vie et même leur complexité.  Les marques se doivent donc de proposer une expérience mais pas seulement au sens d’expérience digitale, ni même d’expérience client, mais une expérience dans un sens plus plein, y compris personnelle et humaine.


Equilibre

Point important : on n’assiste pas à un rejet en bloc du numérique. 

L’étude Viuz / Yougov montre bien que les consommateurs ne rejettent pas le numérique, ni nient son apport. Par exemple, pour gagner leur confiance, les Français pensent que les marques doivent communiquer autant (50%) ou plus (23%) sur le numérique. Ils ont une vue équilibrée du numérique. Ils sont conscients des problèmes et risques qu’il pose (sécurité, fake news, pollution, polarisation ) comme des solutions qu’il apporte (liberté d’expression, ouverture sur le monde, connexion avec les autres…). 

Le besoin de ré-incarnation sans être un rejet du numérique, loin s’en faut, est certainement un refus d’une vie engloutie dans le digital.

Mais plus que tout, il correspond davantage à une recherche d’équilibre.

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