De Lenka Horavova / Shutterstock
Oyez, oyez ! Les réseaux sociaux n’ont désormais plus le monopole du dit « social » ! Une petite révolution se profile ! Un nouvel acteur disruptif ? Que nenni ! Un véritable changement structurel. Le social by design. Entre morcellement et atomisation, décryptage d’une mutation qui va radicalement changer la donne.
Veni, vidi, vici !
Osons ce poncif : la seule constante, c’est le changement. Et en la matière, Facebook et consort portent ce credo avec maestria depuis leurs débuts. De réseaux sociaux qu’ils étaient, à savoir des plateformes permettant de constituer et entretenir un faisceau d’amis ou de connaissances professionnelles grâce à des outils et interfaces de communication, ils sont devenus d’ingénieux couteaux suisses, voire de véritables conglomérats tech.
C’est notamment le cas pour Facebook, qui peut s’enorgueillir d’avancer sur tous les fronts, bien plus qu’on aurait pu imaginer du reste avec ses projets dans les satellites, la cryptomonnaie ou encore l’e-santé. De là à renier son positionnement de base, il n’y aurait qu’un pas ? Nuance. Pour être tout à fait juste, le changement qui s’opère n’est pas vraiment lié à la diversification des géants du secteur, mais plutôt à une appropriation des codes du social par tous. Un certain niveau de maturité a été atteint en somme.
Nous vivons en effet dans une époque où le lien social prend une importance capitale, et ce pour plusieurs raisons : tandis que nos modes de vie s’automatisent crescendo, on nous explique que face aux robots, nous devons cultiver notre différence, à savoir les humanités. Et cette réalité s’applique dans tous les domaines. Aujourd’hui, le défi des marques est donc bel et bien d’être perçues comme des « love brands » en s’appuyant sur l’animation de communautés et leurs porte-paroles (les fameux « influenceurs » !). Bref, le « social » n’a jamais autant eu la côte !
Atomisation du « social »
En toute logique, les mécanismes propres à l’animation de communautés commencent à se décliner partout hors des plateformes qui avaient initié le mouvement. Le but n’est pas forcément de se substituer aux réseaux en vogue mais plutôt de limiter sa dépendance à ces derniers, dans une volonté de renforcer son « owned media » et d’offrir à ses audiences la même qualité d’interaction et d’échanges, quel que soit l’endroit où elles se trouvent. Et les exemples ne manquent pas…
- En premier niveau, médias et marques s’approprient des interfaces, widgets et autres outils permettant l’interaction de leurs audiences : déclinaison des boutons à réactions, des widgets de sondage et questions, intégration de chatbots sur leur propre interface et ainsi de suite.
- En deuxième niveau, on constate l’émergence d’une flopée de nouveaux petits acteurs qui proposent des services extrêmement ciblés pour animer ses communautés on-site, Howtank ou TokyWoky pour des sites e-commerce ou encore Beop pour la publicité conversationnelle, pour ne citer qu’eux. Les outils collaboratifs de plus en plus plébiscités en entreprise deviennent également des réseaux sociaux à part entière. Sans oublie que certaines marques n’hésitent pas à développer leurs propres réseaux sociaux de marque.
- En troisième niveau, et c’est encore plus intéressant, on recourt aux usages détournés, preuve que les mécanismes d’interaction sont ancrés dans notre mindset et peuvent se développer absolument partout. Le site américain Offspring relatait ainsi en début de mois comment des ados américains, dont les parents avaient bloqué ou restreint leurs connexions à certains sites et réseaux, contournaient cette interdiction en transformant un google doc en véritable espace social, tirant alors profit de toutes les fonctions collaboratives offertes par le service ; pas un instant leurs géniteurs n’avaient soupçonné la manœuvre. Rien de plus simple pourtant : il suffit d’ouvrir un document, d’inviter ses amis à devenir des collaborateurs, et le tour est joué ! On dispose d’un espace privé pour discuter, dessiner, partager des liens, télécharger des photos et poster des mèmes. Une fois la session de chat terminée, on supprime le document, on vide le dossier Trash sans laisser d’enregistrement. Étonnant, avez-vous dit ?
Quels enjeux ?
De ces anecdotes, tirons plusieurs enseignements.
- Tout d’abord et comme nous vous l’avons écrit plus haut, il s’agit de regagner de l’autonomie face aux plateformes établies. Bien sûr, on ne peut se substituer à leur présence mais il s’avère possible de rationaliser les usages dans une logique de test-and-learn tout en réinvestissant dans son « owned media. »
- Comprenons bien que la présence sociale et l’animation de ses communautés n’est pas un « luxe » ou un « nice to have ». C’est un prérequis indispensable pour la survie d’une marque. Par ailleurs cette animation sociale ne saurait se limiter à une présence sur Facebook, Twitter ou Instagram ; la logique conversationnelle et sociale doit s’inscrire dans l’ADN de la marque, être exploitée, déployée sur l’ensemble des canaux de l’entreprise. A l’image d’un google doc qui devient lui-même social et conversationnel, les marques doivent s’inscrire dans des logiques servicielles et faciliter les approches communautaires sur l’ensemble de leurs canaux.
Cette tendance du « social by design », pour être plus précis du social qui devient natif quel que soit l’écosystème, la plateforme ou l’outil, met également en exergue la nécessité pour les marques de changer leur façon de communiquer auprès de leurs cibles. On a beau le répéter, en pratique on en est encore loin : l’avenir appartient aux enseignes qui sauront s’éloigner des canons de la communication corporate, intégrer une logique conversationnelle permanente en s’appuyant sur des stratégies d’influence à 360°. Là aussi, nous ne le répéterons jamais assez : l’influence marketing ne se résume pas à activer tel ou tel youtubeur ou instagrameur, « macro, middle ou micro », peu importe. Il faut embrasser le big picture, définir des stratégies bien adaptées à tous les influenceurs potentiels : journalistes, partenaires, employés, clients premium etc et surtout faire converger les dispositifs.
Un postulat qui paraît évident ? Il ne dépend pas de nous d’avoir du bon sens, mais de le conserver et d’en user à propos. Ce n’est hélas pas toujours le cas…
MD