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L’IA mange les compétences… Pas si sûr ?

"Dans l'hystérie et la guerre des narratifs sur l'IA, il est facile et finalement un peu court de dire que l'IA va supprimer des centaines de millions d'emplois, il est peut-être tout aussi exagéré, de proclamer comme certains  qu'elle va créer des millions d'emplois

Comme dans chaque révolution technologique, la réponse est plus nuancée et surtout plus structurée, et l'on sait que les technologies sont parfois soustractives mais souvent additives. Une façon plus fine de se poser la question est de se demander : quelles compétences seront affectées par l'Intelligence Artificielle ? Et quel sera son impact, non sur l'emploi lui-même, mais sur le périmètre des métiers.

C'est la question que s'est posée le Hiring Lab d'Indeed en appréhendant l'impact de l'IA sur 2800 compétences, de la "gestion de compte" à la "guérison de blessures" sous trois dimensions : la connaissance théorique, la capacité de résolution de problèmes et la nécessité d'une présence physique.

L'IA code mais ne guérit pas

La conclusion de l'étude ?

68,7% des compétences ne seraient pas directement menacées par l'IA. L'IA est en effet forte dans le domaine théorique, beaucoup moins dans sa capacité à résoudre les problèmes. Et encore moins quand cette capacité découle de capacités physiques ou manuelles.

Une capacité qui concerne 30,1% des compétences. L'aviation, la cuisine, les soins médicaux nécessitent toujours à ce jour des "tours de main" particuliers et la qualité d'un métier est de savoir faire appel d'une manière souple et intuitive aux aspects théoriques, à la résolution de problèmes et aux talents manuels (ou humains) dans une même séquence. L'étude rappelle par ailleurs que l'IA hallucine souvent ses réponses et que sa base éthique n'est pas…native. 

Dans la tranche des 28,5% de compétences, on trouve les travaux de bureau un peu "stéréotypés" et l'écriture de logiciels "standards". L'IA peut actuellement répondre à 71% des prérequis d'un poste de développeur mais seulement à 32,9% de ceux d'une infirmière. L'IA code mais ne guérit pas. En bref, hormis sur 8% des compétences, l'IA n'est pas prête à remplacer l'humain de sitôt. Il existe même des niches humaines prometteuses à découvrir autour de l'augmentation ou la correction de l'IA.

À ce stade, malgré les promesses de l'Intelligence Artificielle et en termes de productivité sur des emplois standards, la résolution de problèmes avancée, la créativité et l'intelligence émotionnelle font encore la différence. Il est peut-être temps d'arrêter de sonner le glas. 

Jobapocalypse ???

L'économiste Daron Acemoglu, dans un article intitulé "Don't believe the hype", a de son côté estimé le nombre de tâches réellement affectées par l'IA à un niveau très modeste : 4,6%... Et un impact sur le TFP (un indicateur avancé de croissance de la productivité) à 0,66% sur 10 ans, soit 0,06% par an. À ces niveaux, on reste très loin de la Jobapocalypse annoncée… 

Il y a quelques mois, PwC avait également pris une posture moins alarmiste en expliquant que 70% des jeunes générations voyaient l'arrivée de l'IA comme positive et qu'elle offrait l'occasion de remettre au centre du jeu le recrutement par capacités plutôt que par diplômes. 

Le Cedefop européen, constatant que 64% des Européens utilisent déjà l'IA dans le cadre de leur travail, dresse également un état moins anxiogène de l'impact de l'IA sur le futur du travail : même si la majorité des travailleurs estiment que l'IA peut réaliser près de 50% de leurs tâches, ils estiment avoir découvert, ou créé, 41% de tâches nouvelles à plus forte valeur ajoutée. 

C'est aussi la conclusion un poil ironique du Hiring Lab : "Même si la GenAI évolue et apprend à accomplir des tâches exigeantes, les humains qui supervisent, guident et corrigent les résultats obtenus par la GenAI ne seront pas facilement remplacés."

Credits Image Unsplash par Igor Omilaev

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