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Guillaume de Villèle (Ontrust / Onboard) : la quête de sens à l’heure du travail hybride

Travail hybride, quête de sens, valeurs de l'entreprise, révolution collaborative... Où en est-on ?

Nous avons interviewé Guillaume de Villèle fondateur et CEO de Ontrust et de Onboard, et nous l'annonçons ce jour avec fierté : membre du Grand Jury de la Nuit de la Nuit des Rois 2024.

Ontrust, qui va fêter ses 15 ans l’an prochain, accompagne les entreprises à stabiliser leurs équipes grâce à l’intervention d’experts en freelances sur les métiers du digital, des médias, du e-commerce de la communication et de la data dans tous les secteurs d’activité et pour tout type de clients (annonceurs, agences media/com, éditeurs,..). Onboard, créé en 2020, couvre les mêmes métiers mais pour les postes en CDI.

Ontrust / Onboard : quelques mots sur ton activité et quelle philosophie ?

15 ans ! Depuis 15 ans nous accompagnons les entreprises à stabiliser leurs équipes grâce à l’intervention d’experts en freelances pour des postes de directions ou opérationnels. 

Nous sommes spécialisés sur les métiers du digital, des médias, du e-commerce, de la communication et de la data. Pour simplifier, nous sommes une sorte de cabinet de « matching professionnel » pour les agences et les annonceurs !

Quant à Onboard, c’est notre jeune cabinet de recrutement spécialisé sur les mêmes métiers. Nous souflons notre quatrième bougies avec l'arrivée de Frédéric Berlie en tant qu'associé dirigeant ! 

Nous nous sommes aperçus que de nombreux ponts existent entre les deux statuts et que la question du statut du contrat est moins importante que celle de la cohérence de sa carrière. Dans un monde en plein bouleversement la souplesse reste l’atout majeur : « Quand ça change, ça change ! » plaisantait Audiard, et je crois qu’il avait raison.

De quels changements majeurs parles-tu ?

Certains changements ne sont que des évolutions profondes amorcées déjà depuis quelques années, d’autres sont plus soudains, mais tous ont et auront un impact sur les métiers de notre secteur.

Le premier, qui est bien une évolution palpable aujourd’hui, est le passage de « l’art de la communication » à « la science de la communication ». La data media et le MMM (Marketing Mix Modeling) sont devenus les outils des experts indispensables dans un monde media atomisé et ultra personnalisable. Cette évolution régulière du métier a franchi un nouveau cap ces 5 dernières années.

Le deuxième changement est pour moi le poids du consommateur et ses attentes vis-à-vis des entreprises en matière sociale et écologique. Cela tend à brider la communication et in fine à uniformiser celle-ci. Le risque frôle la témérité en matière de prise de parole aujourd’hui.

Enfin, le troisième, est la révolution de l’IA générative qui commence seulement à arriver et qui va sans aucun doute bouleverser l’écosystème comme l’a fait le web dans les années 90. Aujourd’hui le sujet est sans doute encore sous-évalué car souvent mal positionné. Au-delà des postes qui vont muter, voire disparaître, la relation entre la marque et le consommateur va se réinventer. 

Et au niveau RH cela évolue-t-il ?

Fort de ces changements, les métiers de la publicité attirent de moins en moins de monde ou des profils différents. Les créatifs ne s’y retrouvent plus, tout comme les passionnés des médias. Aussi, les agences – media en particulier – ont toutes les difficultés à recruter et à fidéliser leurs collaborateurs. 

Malgré la hausse des salaires des années 2021-2022 (liés à la pénurie de main d’œuvre liée à l’explosion des investissements publicitaires), ils restent encore inférieurs à ceux des cabinets de conseil spécialisés et des GAFA. Le défi des agences et des annonceurs réside dans leurs capacités à enthousiasmer ses collaborateurs en redonnant du sens à leur métier et dans sa réalisation au quotidien. La créativité sous toutes ses formes (y compris la créativité data) doit revenir dans le monde de la communication. L’esprit pionnier et l’aventure sont attendus par tous.

Travail au domicile / travail au bureau : assiste-on à un effet de ciseaux entre les aspirations des collaborateurs et les attentes des employeurs ? 

En à peine quelques semaines nous avons vu fleurir les appels à revenir au bureau. Sur le fond c’est mille fois entendable et je valide également cette nécessité de travailler côte à côte, en particulier par rapport à cette créativité tant attendue ; en revanche cela perturbe le quotidien de nombreux collaborateurs et freelances partis en province en pensant que cela serait acquis – et nous le pensions tous ! Quand Elon Musk a demandé à ses salariés de revenir au bureau en juin 2022, nous le traitions de conservateur n’ayant rien compris au sens de l’histoire mais en définitive toutes les entreprises ont suivi le mouvement. Fort de ce constat, aux entreprises de rester agiles et malines pour savoir profiter de l’opportunité de fidéliser ses équipes. Nous avons quelques clients – et nous aussi au passage – qui avons décidé d’ouvrir des bureaux en province pour y dupliquer l’entreprise.     

Les collaborateurs ont-ils une attitude consumériste, sans attachement à l’entreprise ? 

Difficile de faire des généralités en la matière, toutefois la fidélité est en effet une qualité qui semble s’éroder en se moment. Pourtant elle est très belle et sans elle nulle confiance possible. Si nous cherchons à retrouver la fidélité des salariés, commençons nous-même à construire cette indispensable confiance. Arrêtons de chercher à convaincre par des communications fades et convenus pour appliquer les actes que nous attendons tous dans l’entreprise.

L’entreprise est-elle donc vide de sens, sans mission, sans valeurs ? 

Bien sûr que non, heureusement ! Toutefois, plus nous entendons le mot bienveillance dans le monde du travail plus celui-ci semble galvaudé. Bien sûr les entreprises ont un grand rôle social à jouer mais souvent elles ne le jouent que pas opportunisme. La communication reste trop souvent le maquillage de l’entreprise au lieu de porter la voix réelle de celle-ci. Le risque est de voir leur parole perdre en crédibilité comme l’ont été avant celles des politiques. 

Pour vous livrer une anecdote, un grand groupe international avec qui nous travaillions qui se targue d’être un exemple en matière de RSE, nous a menti et a prétexté une fin de mission pour prendre en direct notre consultant. Cette histoire ne devrait pas arriver quand on se gargarise d’être respectueux de ses prestataires. Un parfait contre-exemple en externe et en interne ! Un parfait contre-exemple en externe et en interne ! Ne demandons pas aux salariés d’être ce que l’entreprise n’est pas. Aux dirigeants de montrer l’exemple en étant moralement, et personnellement, irréprochables.    

On parle de révolution collaborative, avec notamment plus d’agilité en interne et dans la relation entre collaborateurs internes et externes. Est-ce une réalité ?

Depuis une dizaine d’années nous voyons clairement la frontière entre l’interne et l’externe se confondre. Le pragmatisme de la compétence permet aux entreprises de ne plus voir ce qui vient de dehors comme systématiquement inférieur. Elles savent piocher les talents là où ils se trouvent. Je suis agréablement surpris de voir que la plupart des freelances avec lesquels nous travaillons, même s’ils demeurent indépendants et là que pour quelques semaines, sont considérés comme des membres à part entière du projet de l’entreprise. Cette considération permet à chacun de chercher le meilleur pour le projet collectif. 

Un conseil aux entreprises ?

C’est toujours délicat de donner des conseils aux autres… en ce qui me concerne je cherche simplement à progresser dans un environnement instable en restant aligné avec ce que je crois et je dis. La cohérence n’est-elle pas une des clefs de la confiance ?

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