Il y trois mois on a perdu Mathilde...D’accord les restrictions budgétaires nous pendaient au nez, on le sentait venir, on a résisté le plus longtemps possible. Le jour de son départ, un vendredi, toujours souriante et vaillante, Mathilde nous a tous remerciés un par un dans un discours poignant. Le Lundi, tout le monde avait la gueule de bois, on baissait les yeux, on s’est à peine parlé.
Il y six mois la situation était mal engagée et la croissance atone, le directeur financier s’est déplacé de Londres, un CFO émacié aux yeux de colin triste chargé de couper sans émotion ce qui pouvait être coupé. Sa question a vite fusé : “Elle fait quoi Mathilde au juste ?” En tant que directeur du bureau parisien, je me suis emmêlé les pinceaux sur une vague description d’Assistante Account manager matinée d’Office manager et de nounou d’équipe. “Mais les Allemands n’ont pas ce type de poste” a rétorqué le colin triste...Pire, je n’ai pu raccrocher Mathilde à aucun KPI.
En fait Mathilde, était l’âme de l’équipe c’était ce que les Ango-Saxons nomment un “Glu People”.
RIP Glu People
Mathilde est partie depuis trois mois, j’ai du faire face à deux démissions , l’ambiance s’est délitée dans l’équipe devenue compétitive et finalement toxique.
Toujours énergique, empathique, souriante et disponible, Mathilde était plus qu’un membre de l’équipe, c’était notre âme, notre mère, notre liant. Il y a dix ans, les personnes comme Mathidle on les appelait des perles, maintenant ce sont des dispensable assets.
Avant Mathilde, l’équipe c’était une famille, maintenant c’est une zone de guerre.
Pas KPIsable
J’ai depuis parlé à de nombreux amis, eux aussi ont vu les Glu people “non monetisables”, pas assez agressifs, trop gentils, pas KPIsables, disparaître des plateaux parce que l’on n’arrivait pas, nous les managers, à justifier auprès des CFOs leur grand coeur dans une toute petite cellule Excel.
Rétrospectivement, le départ des Glu People a souvent marqué le début de la fin des structures qu’elles tenaient à bout de bras.
C’était il y a un an. J’ai finalement quitté ma boite il y a une semaine.
Mathilde fait depuis le bonheur d’une petite PME artisanale de 50 personnes. Dans mon prochain job, j’essaierai de la ré-embaucher...Si elle le veut bien...
Avant, je m’assurerai que ma nouvelle boite considère les Glu People comme Mathilde comme des humains indispensables, pas une ressource négative dans un tableur.