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Albane Liger-Belair (KPMG) : Les crises successives que nous traversons induisent de nouvelles formes de création de valeur

Nous avons interviewé Albane Liger-Belair, Directrice de l’Innovation chez KPMG France, autour de son book des tendances 2023, sorti il y a quelques semaines, et plus largement sur l’économie des transferts positifs.

KPMG et l’innovation ?

Chez KPMG, le rôle de la Direction Innovation, c’est d’accompagner les transformations du cabinet et de nos clients pas uniquement sur l’axe technologique mais sur l’ensemble de leurs dimensions : innovation sociale, managériale, environnementale. Au centre de notre démarche, il y a la notion d’impact qui résonne avec notre engagement d’entreprise à mission. Nous avons quatre pôles, l’open innovation avec un écosystème de 2500 startups, influenceurs et experts Innovation, le studio qui accompagne les clients dans leurs démarches d’innovation, l’accélérateur qui acculture les collaborateurs à l’innovation en portant des projets d’intrapreunariat et la prospective qui permet d’identifier les signaux émergents porteurs de challenges et d’opportunités pour nous-mêmes et nos clients. Nous venons d’ailleurs de publier notre book de tendances annuel sur le thème de « l’Economie des transferts positifs » qui explore les nouvelles formes de créations de valeur qui apparaissent suite aux crises successives que nous traversons, et qui sont à la convergence du business, de l’humain et plus largement du vivant.

Vous proposez une nouvelle façon de faire de la prospective ?

KPMG Innovation Lab a mis en place une méthode d’exploration qui passe par la réflexion, la co-construction et l’intelligence collective. Pour cette 3ème édition de notre Book de tendances, nous avons mis autour de la table des décideurs, dirigeants d’entreprises et experts, mais aussi des étudiants et des personnalités inspirantes, qu’il s’agisse d’artistes, de designers, de chercheurs ou d’entrepreneurs innovants.

Vous articulez deux temps, le court et le long, pouvez-vous nous en dire plus ?

En faisant parler les signaux faibles d’aujourd’hui, nous voulons anticiper les évolutions de la société et des organisations, pour construire une vision dynamique du futur. Deux temporalités ont ainsi été explorées, reflétées dans ce Book à travers deux niveaux de lecture qui se répondent.

Le premier niveau correspond aux six grandes tendances qui font apparaître l’économie de demain. Elles s’intéressent notamment aux évolutions qui émergent en faveur de la préservation du vivant et du développement de la technologie, aux manières de consommer et de produire, aux aspirations des individus, etc. Chacune des tendances peut se lire indépendamment, tout en étant reliées entre elles et complémentaires.

Le second niveau explore des horizons temporels plus lointains, en 2035, représentés par trois « Zones à Rêver » – c’est-à-dire des projections de futurs souhaitables – et incarnés par des récits fictionnels qui prolongent et interrogent les six grandes tendances identifiées.

Quelles principales tendances avez-vous mises au jour ?

Six principales tendances ont émergé de nos travaux, qui constituent autant de champs potentiels de création de valeur à impact positif.

« Bio-continuum » : un nouveau paradigme émerge visant à restaurer et établir une nouvelle relation avec nos écosystèmes. De l’inspiration du vivant à la régénération de l’environnement, l’année 2023 va voir s’opérer un changement radical des modèles d’innovation, qui s’inscrivent dans des approches symbiotiques nouvelles, et une prise en compte plus globale des impacts écologiques.

« Multicrise » : alors que l’accumulation des crises met en tension des modèles traditionnels de résilience, la capacité des organisations à résister et à anticiper devient un facteur de compétitivité majeur. Les modèles de création de valeur se réinventent, autour par exemple de KPIs extra financiers et de pactes d’actionnaires, pour s’inscrire dans des logiques de durabilité.

« Plus de moins » : dans un monde de pénurie, de rationalisation des chaînes de production et de modèles de performance de moins en moins pérennes, la sobriété s’impose comme un nouveau champ de création de valeur durable, reposant sur de nouvelles approches d’essentialité et d’ajout de sens.

« Economies du lien » : jusqu’alors limitées et souvent contraintes, les logiques collaboratives prennent une nouvelle dimension et passent à une véritable économie du lien. Celle-ci s’appuie sur des écosystèmes étendus de partenaires où la création de valeur se construit aussi hors des frontières de l’entreprise.

« ADN Tech » : entre nouveaux territoires de conquêtes – métavers, web 3, etc. – données massives partagées, défis de la tech responsable et enjeux d’appropriation, la technologie touche l’intégralité des composantes des entreprises et est essentielle à l’implémentation de la stratégie et à la transformation des organisations.

« L’humain au cœur » : alors que l’humain s’impose plus que jamais au cœur des organisations, l’engagement dépasse désormais l’horizon RH et devient un socle stratégique à investir voire à réinventer, générant de nouveaux ressorts d’attractivité et de fidélisation pour les marques comme pour les employeurs.

Qu’entendez-vous par transferts positifs ?

La prise en compte du long terme et l’altruisme envers les générations futures sont au cœur même des concepts d’économie positive et à impact. Leur objectif : transformer en profondeur l’ensemble des domaines d’activité, de la santé à l’éducation, en passant par la culture, le numérique et l’énergie.

La succession de crises que nous traversons nécessite des transformations urgentes à opérer : repenser son utilisation des ressources, recréer du commun, renouer du lien entre les générations, réinventer les modes d’échanges et d’interaction, réincarner ses valeurs, redéfinir la notion de prospérité, revaloriser l’épanouissement et le bien-être...

Ces nécessaires transformations, nous les avons appelées « transferts ». Positifs parce qu’ils sont sources de nouveaux gisements de valeur et de nouveaux modèles économiques (économies circulaire, symbiotique, solidaire, sociale, régénérative…) souhaitables pour l’humain et l’environnement.

Pouvez-vous nous en dire plus sur le Vivant ?

Pendant trois mois, notre travail collectif a eu pour cadre trois ateliers prospectifs en parallèle desquels, pour permettre une projection dans un futur souhaitable, nous avons créé des Zones à Rêver. La Zone à Rêver « Place au vivant » a ainsi imaginé une communauté qui prônerait la valorisation du vivant et l’enrichissement sociétal en pensant en termes de biens communs et de biodiversité. Dans cette communauté, l’économie serait centrée sur le social et guiderait les interactions, les flux, le travail en harmonie avec l’environnement. Le respect de l’être humain et le respect de la Terre sont du même ordre de priorité et se renforcent l’un l’autre.

Le numérique : quel bilan et quelle vision ?

Le numérique est un instrument de progrès, pas une fin. La Tech society est un projet où technologie et humain se combinent pour bâtir une société respectueuse de l’Homme et de l’environnement, capable de répondre de manière ultra-personnalisée aux besoins de chacun. Les atouts et défis de la tech sont autant d’invitations à l’exploration de nouvelles raisons d’être pour les entreprises et les organisations.

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