Quels sont les impacts de cette crise sanitaire sans précédent sur la consommation responsable des Français ? Quelle est la place de l'achat équitable, celle du bio ou du local ? Quelles prises de conscience ? Quels changements dans des comportements ? Max Havelaar France publie les résultats inédits de la seconde édition de son Baromètre de la Transition Alimentaire réalisé par OpinionWay.
Trois enseignements majeurs :
- La crise de la Covid-19 a permis des prises de conscience nouvelles sur la consommation responsable : volonté de consommer plus responsable, importance des produits importés, changement des lieux d'achat, coup de frein sur le vrac. La crise a bouleversé les perceptions.
- Si on constate un désengagement sur certaines catégories (cosmétiques, entretien...), la consommation responsable alimentaire résiste bien et se maintient malgré la crise. Cette seconde édition du baromètre révèle cependant la persistance de freins qui empêchent son changement d'échelle rapide.
- Si les Français gardent de fortes attentes de responsabilité envers les entreprises ils déclarent en même temps une volonté inédite d'être davantage acteurs de la transition à leur niveau.
1 - Quels sont les impacts de la crise sur la consommation responsable ?
La crise a permis des prises de conscience nouvelles sur l'importance de la consommation responsable
La pandémie de Coronavirus est venue bouleverser les certitudes et les pratiques des Français en matière de consommation responsable. Elle les a conduits à davantage réfléchir à leurs façons de consommer.
Pour 73% des Français, le contexte de crise leur donne (davantage) envie de consommer responsable. 62% d'entre eux reconnaissent que la crise leur a fait prendre conscience de la nécessité d'avoir des comportements plus vertueux comme limiter les emballages, acheter local, équitable, etc. Et la période de confinement a été un déclencheur : la période de confinement a fait prendre conscience à 66% des français qu'il était possible de limiter leur consommation. La prise de conscience se traduit également dans le budget alloué : si pour 1 Français sur 2 le budget alloué aux produits alimentaires responsable va rester stable à l'avenir, 33% prévoient de l'augmenter.
Si l'envie d'une consommation 100% locale fait un bond (+24%), les Français restent paradoxalement attachés aux produits importés (chocolat, café, riz...)
78% des Français se disent favorables à consommer des produits 100% locaux, et ce chiffre est en progression de +24% par rapport au 1er confinement. Cependant, les Français l'affirment : cette crise leur a permis de prendre conscience que beaucoup de produits du quotidien, sont importés (58%) et beaucoup ne sont pas prêts à se passer de ces produits, notamment :
- 73% de chocolat (stable depuis le 1er confinement)
- 73% de riz (-2 point)
- 67% de café (+1 point)
- 64% d'épices (+ 4 points)
- 56% de bananes (+1 points)
- 47% de thé (-1 point)
- 27% de quinoa (+ 5 points)
Au total 93% ne sauraient se passer d'au moins un des sept produits importés testés.
Lieux d'achat : les Français choisissent plus de proximité, de lien avec les producteurs, et ralentissent sur le vrac
Si les enseignes généralistes restent l'endroit privilégié pour réaliser ses achats alimentaires responsables, cette seconde édition dévoile une nouvelle tendance : le recours aux magasins bio et lieux de proximité est important et croissant : depuis l'apparition de la Covid-19, la fréquentation :
- des marchés a augmenté de 8 points (51% y font leurs courses aujourd'hui contre 43% auparavant),
- 27% se fournissent directement chez les producteurs (+7 points),
- et 27% se rendent désormais dans les enseignes bio (+4 points).
Mais pour quelles raisons ? Les Français interrogés évoquent en premier lieu la qualité des produits (44%) puis la proximité 34% et la diversité des produits responsables proposés est mentionnée par 31%
Vrac : un coup de frein à une tendance pourtant très appréciée des Français
L'achat en vrac est approuvé par près de 80% des Français. Ils perçoivent cette solution comme un moyen efficace de lutter contre le suremballage (85%) et permettant de limiter le gaspillage alimentaire (79%).
Néanmoins, la pandémie a eu un impact négatif sur cette pratique : 39% des Français l'ont abandonnée ou limitée, à cause de la crise sanitaire.Et de fait, pour un Français sur trois l'épidémie a incité à préférer les produits jetables (35%). Le vrac est aujourd'hui jugé trop contraignant par deux Français sur trois (66%) : notamment parce qu'il est difficile de trouver des magasins le proposant.
2 - Malgré la crise, la consommation responsable alimentaire résiste mais des freins persistent empêchant plus de passages à l'acte et rapide changement d'échelle
Le secteur alimentaire a certes été bousculé par la crise sanitaire, mais semble préservé en matière de préférence d'achat responsable des Français, comparé à d'autres catégories de produits courants. Aujourd'hui, 79% des interviewés déclarent que l'alimentaire est le secteur pour lequel ils privilégient le plus le fait que les produits soient garantis « responsables », soit au moins deux fois plus que les catégories suivantes qui perdent 8 à 9 points : l'hygiène-beauté (42%, - 9 points), les produits d'entretien (-8), l'habillement (-9) .... L'alimentaire reste relativement stable (-2 points).
« Les Français repriorisent leurs choix responsables. La tendance constatée l'année dernière était à la fois multicritères (bio, local, équitable, zéro emballage...) et multi-catégories. On voit avec la crise le maintien d'une priorité : l'alimentation ! Même si pour 60% des Français, les enjeux sanitaires ont pris le dessus dans les préoccupations quotidiennes, la consommation alimentaire responsable se maintient dans le choix des produits et, nouveauté, dans une préférence croissante pour les points de vente « directs producteurs », les marchés notamment, mais aussi les magasins bio » explique Blaise Desbordes - DG de Max Havelaar France
Le soutien aux producteurs est la première motivation « responsable » des Français
Comme l'an dernier, la rémunération des producteurs est la première motivation des Français pour une consommation responsable, afin de leur permettre de vivre leur travail (57%, -2 points). Le sentiment qu'adopter une consommation alimentaire responsable permet d'agir pour la planète est en baisse de 5 points (48%) et surtout que cela permet de réduire le gaspillage et le suremballage chute de 8 points en un an (45%). En parallèle, la santé ne semble pas en bénéficier, puisque l'idée qu'avoir une consommation responsable permet de faire attention à sa santé recule de 4 points (50%). Cette baisse de motivations s'étend à toutes les populations, même les plus engagées, les plus impliquées.
Par rapport à l'an dernier, l'évolution de la consommation de produits responsables est stable, aussi bien que la part d'acheteurs. Entre 40% et 51% des acheteurs fréquents ne consomment ni plus ni moins de chacun des types de produits testés, soit des évolutions de +11 à +17 points.
Cependant la crise renforce les freins des Français, du prix à l'effort que cela demande
Le prix constitue toujours aussi bien le premier critère d'achat des courses alimentaires des Français (59%) que le premier frein à l'achat responsable (72%, +3 points), frein qui devrait se renforcer : un Français sur cinq anticipe une hausse de prix des produits responsables (19%).
Autre frein réside dans l'implication personnelle des Français : 49% nous disent avoir le sentiment d'en faire déjà suffisamment.
Pour près de 70% des Français interrogés consommer des produits responsables à 100% ou presque demande trop d'efforts et de changements au quotidien (difficiles à trouver, renoncer à certains produits, changer de lieux d'achat).
Une majorité des Français interrogés estime que certes, consommer de manière responsable a un impact positif mais que ces bénéfices sont trop souvent contrebalancés par des pratiques désastreuses en parallèle (79%), le recours au bio sous plastique en étant une parfaite illustration. L'action responsable est approuvée mais annihilée par d'autres gestes dévastateurs.
3 - Le consommateur veut agir plus et attend des entreprises du secteur une mobilisation
Les Français veulent agir
Ce baromètre révèle une volonté croissance de la part des consommateurs : ils le reconnaissent de plus en plus, ce sont bien eux qui ont le plus de pouvoir pour favoriser l'essor du secteur alimentaire responsable (35%, +9 points).
Et attendent une mobilisation de la part des entreprises du secteur
53% des Français considèrent que les entreprises du secteur alimentaire sont prêtes à réaliser des changements environnementaux, sociaux et solidaires (53%, +1 point), par contre, moins d'un sur dix en est certain (9%).
Mais une fois n'est pas coutume : les français sont bercés par des contradictions :
- Pour 80% des Français les entreprises du secteur alimentaire évoluent trop lentement pour leur permettre d'améliorer leur alimentation. Et aujourd'hui, 90% attendent de leur part qu'elles en fassent plus pour proposer davantage de produits responsables.
Toutes ces évolutions constituent autant d'éléments qu'il faudra suivre dans les prochaines vagues afin de pouvoir déterminer si elles n'ont été qu'une courte anomalie causée par la pandémie ou si elles s'inscrivent dans la durée.
Photo by Wes Hicks on Unsplash
Méthodologie : Le baromètre Max Havelaar France de la transition alimentaire a été réalisé par OpinionWay auprès d'un échantillon de 2034 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, constitué selon la méthode des quotas. Les interviews ont été réalisées en ligne du 16 au 22 octobre 2020. OpinionWay rappelle que les résultats de ce sondage doivent être lus en tenant compte des marges d'incertitude : 0,9 à 2,2 points au plus pour un échantillon de 2000 répondants. OpinionWay a réalisé cette enquête en appliquant les procédures et règles de la norme ISO 20252. Toute publication totale ou partielle doit impérativement utiliser la mention complète suivante : « Sondage OpinionWay pour Max Havelaar France » et aucune reprise de l'enquête ne pourra être dissociée de cet intitulé. `