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Marques « green » : 5 tactiques pour réduire l’empreinte carbone

Les consommateurs exigent désormais des marques qu’elles aient une attitude responsable et durable. Mais concrètement, quelles tactiques emploient les marques pour réduire leur empreinte carbone ? Pour y répondre nous avons épluchés les rapports environnementaux de marques, ainsi que les cas publiés par des éditeurs de logiciels de bilan carbone (un secteur où opèrent de nombreuses startups françaises listées en fin d’article). Nous en avons extrait 5 tactiques de marques pour améliorer leur bilan carbone. Avec des exemples de l’Oréal, le Slip Français, LVMH et Kering.

(Image : Isravel Raj, via Unsplash)

Rappel sur les attentes « durables » des consommateurs

90% des consommateurs européens attendent des marques qu’elles s’engagent réellement et les aident à mieux consommer en s’engageant dans la transformation verte (Oney – Etude consommation raisonnée). Les 3 principaux leviers identifiés par les consommateurs pour cette consommation raisonnée : le gaspillage alimentaire, l’obsolescence programmée et les modes de fabrication des produits.

A date, plus de la moitié des consommateurs européens interrogés ne croit pas aux promesses des marques en matière de développement durable. Alors plutôt que de parler des promesses, regardons les actes concrets. Avec une sélection de 5 tactiques de marques pour réellement réduire leur empreinte carbone.

1. Analyser le cycle de vie des produits

La première tactique est en fait une étape cruciale de mesure et diagnostic. L'analyse du cycle de vie (ACV) est une méthode (encadrée par la norme ISO 14040 à 14043) qui permet d'évaluer les impacts environnementaux associés à toutes les étapes de la vie d'un produit (ou d’un service). (Détails sur le site de l’Ademe) L’analyse va de l’extraction des matières premières à la fin de vie, autrefois oubliée par les marques. Mais elles sont plus en plus nombreuses à mettre en place des filières de revente ou recyclage (cf. notre article « De l’économie de l’abonnement à l’économie circulaire », avec les exemples de Lululemon et Décathlon) .

Exemple avec Le Slip Français qui a mené cette démarche d’ACV pour cartographier ses processus et leviers d’action et ainsi soutenir une démarche d’écoconception. Parmi les leviers identifiés : aller vers des matières alternatives. Les matières biocentrées (coton et laine issus de l’agriculture biologique, lyocell), les matières recyclées (coton, laine, polyamide et polyester recyclés), les matières locales (lin, laine française, mélanges à partir de fibres locales) et les matières upcyclées (récupérées pour fabriquer de nouveaux produits).

(Source : Le slip Français / Moncoton )

Le Slip Français souhaite que 75% de ses volumes soient issus de ces matières alternatives d’ici 2023. (source rapport de mission Le Slip Français 2022) La marque cherche aussi à mettre au point « la fibre de demain » basée sur le principe de l’économie circulaire. Elle travaille sur le projet MonCoton pour développer de nouvelles techniques de recyclage du coton, en collaboration avec la marque 1083 (Modetic). Des tests sont menés depuis 2 ans et un produit à partir de ce fil de coton recyclé pourrait être disponible en 2023.

2. Ecoconception pour la réduction des emballages

De nombreuses autres marques se sont lancées dans l’écoconception, pour améliorer tout ou partie du cycle de vie de leurs produits.

Par exemple, L’Oréal a adopté une démarche d’écoconception de ses emballages depuis 2007. Ses 3 axes : réduire les emballages, remplacer certains matériaux et recycler. D’ici à 2030, 100 % des emballages plastiques de l’Oréal seront d’origine recyclée ou biosourcée (objectif 50 % d’ici à 2025). D’ici à 2025, 100 % des emballages plastiques seront rechargeables, réutilisables, recyclables ou compostables. (Source : politique L’Oréal sur les emballages plastiques)

L’Oréal a aussi développé un outil pour calculer et améliorer l’impact social et environnemental de tous les produits du groupe : SPOT (Sustainable Product Optimisation Tool). L’Oréal peut ainsi quantifier des axes d’amélioration sur l’emballage, la formulation des produits, le sourcing et l’impact social des produits. Exemple avec l’amélioration de l’impact environnemental et social de la crème Aqualia Thermal.

(Source L'Oréal)

3. Réduire la consommation électrique

LVMH équipe ainsi ses boutiques d'ampoules LED. Entre 2019 et 2021, la marque a réalisé 6% de réduction des émissions de CO2 liées à la consommation d'énergie grâce à la performance énergétique de ses boutiques. LVMH regroupe 75 Maisons réalisant 79,2 milliards d’euros de ventes en 2022 avec un réseau mondial de plus de 5 600 boutiques.

En 2021, 57% des boutiques étaient équipées de LED. LVMH prévoit que 100% des boutiques le soit d’ici 2026, et que 100% de sa consommation d’énergie soit bas-carbone. En 2021, seuls 39% de son énergie consommée était d'origine renouvelable. Source LVMH : Extrait du Rapport de gestion du Conseil d’Administration 2021 – Environnement & durabilité (Document accessible depuis la page Gouvernance du site LVMH).

Le groupe a créé le programme « LVMH Lighting » qui accompagne les architectes de ses Maisons pour la conception des installations d’éclairage LED. (détails dans LUX, la revue francophone de l’éclairage). LVMH Lighting et TEMELOY (un studio de design britannique) ont aussi lancé en 2018 le Think Tank « Lighting for good ». Il regroupe 25 fournisseurs d’équipements d’éclairage pour qu’ils collaborent ensemble dans l’éco-conception de luminaires éco-responsables et réparables.

(Source : Lighting for good)

LVMH met aussi en œuvre de nombreuses autres initiatives dans le cadre de son programme LIFE 360. Avec notamment en 2023 le lancement de nouveaux services circulaires (réparation, surcyclage, etc.) et d’ici 2030, 100 % des nouveaux produits inscrits dans une démarche d’éco-conception. (plus de détails sur la page « indicateurs extra-financiers » de LVMH)

4. Optimiser la chaine logistique

Le programme de développement durable « L'Oréal pour le Futur » a pour objectif de réduire de 50% (en moyenne et par produit fini), les émissions de gaz à effet de serre liées au transport des produits du groupe cosmétique (par rapport à 2016, et d’ici à 2030).

Les transports sont prioritaires dans ce programme. Sur la longue distance avec des modes de transport alternatifs (fret maritime et ferroviaire), des motorisations moins polluantes (camions à gaz naturel liquéfié (GNL) et, dans le futur hydrogène). Sur les courtes distances et le « dernier kilomètre », l’Oréal développe l’utilisation de motorisations moins polluantes véhicules électriques, GNL, vélo).

(Source : L’Oréal)

Cette démarche demande plus d’anticipation grâce à une meilleure analyse des données. Par exemple pour s’assurer que des coffrets cadeaux arrivent à temps à noël dans toutes les boutiques en passant par du fret maritime (détails sur la page Transport vert du site L’Oréal).

5. Partager les données au sein de son écosystème

Kering a créé sa propre plateforme de mesure carbone (l’EP&L, pour Environmental Profit & Loss, ou Compte de Résultat Environnemental) et partage des data avec son écosystème. L’initiative concerne le secteur du luxe mais aussi au-delà avec les partenaires industriels et de transport notamment. 

Objectif de Kering : réduire de 40 % son empreinte environnementale globale (de 2017 à 2025). En 2020 Kering avant communiqué ses résultats à mi-étape : -14% réalisés. En attendant, depuis 2018 Kering atteint la carbo-neutralité de ses opérations et de sa chaîne logistique par des opérations de compensation (préservation d’écosystèmes naturels) (Source rapport Sustainability progress report 2017-2020 de Kering).

(Source Kering)

Des rapports et outils pour se lancer

Pour inspirer les entreprises, le site Wearegreen.io recense les bilans carbones des entreprises (et reprend des données publiques, comme celles de l’Ademe avec son moteur de recherches de bilans carbones).

(Source Wearegreen.io, exemple de la fiche sur LVMH)

L’initiative Wearegreen est portée par Galadrim. Cette agence de développement web et mobile s’est engagée à réduire (et compenser) ses émissions de gaz à effet de serre, avec l’accompagnement de la startup française Greenly, spécialiste du bilan carbone pour les PME. Galadim édite aussi l’outil en ligne Orki pour calculer les émissions carbone.

De nombreux outils sont disponibles sur le marché pour aider les entreprises à mesurer et réduire leur empreinte carbone. Si vous souhaitez tester des solutions « made in France », le média d’intelligence écologique « les horizons » liste 10 startups françaises spécialistes du bilan carbone: Aktio, Greenly, Impact+, Mobiteep, Carbo, Fruggr, Sweep, WeCount, Impact Track, Zei.

Séverine Godet