Cet été, Amazon s'est lancé sur le marché des bracelets connectés avec Amazon Halo. Les premiers bêta-testeurs ont été prompts à pointer les limites de ce gadget, notamment pour le manque de fiabilité de ses mesures. Et attention aux dérives. Car Amazon Halo va plus loin que les trackeurs d’activité classique, en s’aventurant sur le terrain de la santé connectée et de la psychologie, avec le tracking des émotions. Voici le portrait-robot en 5 points du Amazon Halo.
#1 : Un produit et un service
Pour 64,99 US$ en offre de lancement, l’achat d’un Halo Band (le bracelet connecté) inclut 6 mois d’abonnement au service Amazon Halo. Disponible pour le moment uniquement aux Etats-Unis, le package Amazon Halo + Halo Band sera ensuite proposé à $99.99 avec un abonnement de 3.99 $/mois.
Amazon Halo est autant un produit qu’un service, puisque les données des capteurs viennent alimenter des conseils de santé et de bien être dopés à l’Intelligence Artificielle. Ces capteurs comprennent un accéléromètre, un capteur de température, un moniteur de fréquence cardiaque (utile autant pour le suivi des activités sportives que de la qualité du sommeil), deux microphones (pour le fameux tracking des émotions), un témoin lumineux LED et un bouton pour allumer et éteindre les micros. Plus de détails techniques dans cet article de ZDNet.
#2 : La quête du gras : Amazon halo mesure la masse graisseuse
Amazon Halo inclut la mesure de la masse graisseuse et le calcul de l’IMC (Indice de Masse Corporelle), présenté comme une mesure plus fiable que le simple rapport poids/taille. Amazon Halo va plus loin que les bonnes vieilles balances à impédancemètre, en pondérant ces mesures avec l’analyse d’un modèle 3D du corps de l’utilisateur. Basée sur des modèles algorithmiques, ces analyses sont générés à partir de photos que l’utilisateur aura uploadé sur la plateforme. Les concurrents sur le créneau des bracelets connectés, comme Fitbit et Apple Watch ne proposent pas encore cette mesure du gras.
Mais attention à la fiabilité des résultats. Parmi les premiers bêta-testeurs, le responsable de la rubrique technologie grand public du NY Times n’a pas été tendre avec le Amazon Halo. Surpris par les résultats, qui indiquaient dans son cas 25% de masse graisseuse, il a consulté son médecin qui l’a rassuré par d’autres mesures. Conclusion du praticien : l’algorithme du Amazon Halo aurait un biais à surévaluer la masse graisseuse. Car une sous-évaluation aurait de grave conséquence pour des utilisateurs obèses dont la santé est en jeu.
Détail qui pourra refroidir plus d’un utilisateur : les scans 3D de leur corps (basés sur des photos à prendre en vêtements moulants) seront envoyés sur les serveurs d’Amazon avant d’être supprimés “sous douze heures” (détail surprenant relevé par Le JournalduGeek qui précise qu’heureusement ce service est interdit aux moins de 18 ans).
#3 : Analyse de la voix : attention à votre petit ton
L’autre limite pointée dans ce même article du NY Times touche à la fonctionnalité du Amazon Halo qui soulève le plus d’interrogations : le trackeur d’émotions. Amazon propose en effet d’analyser le ton de la voix de l’utilisateur (ainsi que l’intensité, le tempo et le rythme) pour lui indiquer comment il est perçu par les personnes de son entourage. Alors attention à votre « petit ton ». Car Halo vous indiquera si vous semblez heureux, ennuyé ou troublé et vous permettra de vérifier si le ton de votre voix correspond au sentiment que vous cherchiez à transmettre.
L’auteur du NY Times a très rapidement désactivé cette fonctionnalité. Précisons que si ce testeur n’a pas supporté cette invasion de sa vie privée elle n’est possible que lorsque l’utilisateur active volontairement les micros du Amazon Halo. Même si Amazon précise que ces enregistrements ne sont pas uploadés dans le cloud mais analysés en local par la montre puis détruits, il est légitime de s’interroger sur la sécurité de ces données. Ces données ne sont pas non plus exploitées à des fins marketing, par Amazon ou son écosystème, pour le moment.
#4 Un écosystème qui va grossir
Amazon Halo est un trackeur d’activité qui va aussi proposer des actions pour permettre à l’utilisateur d’adopter de bonnes habitudes de vie. Amazon Halo déjà propose plus de 100 « Labs » (des petits programmes d’activités) créés par l’entreprise ou des partenaires tiers. Parmi ces partenaires, Openfit, une plateforme de streaming d’activités de bien-être et de fitness, comme des cours avec des coachs, du Yoga, et des programmes nutritionnels (détails du partenariat sur L.A. Biz).
Autres activités intégrées dans l’abonnement Amazon Halo : celle d’autres applications de fitness, comme 8fit, Exhale (l’application de fitness du groupe hôtelier Hyatt Hotels, fruit d’une acquisition réalisée en 2017), l’application de méditation et de santé mentale Headspace, ou encore des organismes de santé comme l’American Heart Association.
Cet écosystème de santé et bien-être sera appelé à grossir, pour capter plus d’utilisateurs sur un marché du « wearable » qui devrait atteindre 52 milliards en 2020 (Source Gartner).
#5 : le filon de la santé numérique
Les données du Amazon Halo peuvent déjà être utilisées par certains établissements de santé, à travers un partenariat entre Amazon Halo et le groupe Cerner, qui représente 26% du marché américain du Dossier Patient Informatisé (EHR pour electronic health record) (Source Business Insider).
Depuis plusieurs années, Amazon investi largement dans le secteur de la santé mais aussi de l’assurance. En mars 2019, Amazon, JPMorgan et Berkshire Hathaway avaient ainsi lancé Haven, une organisation à but non lucratif pour améliorer la couverture maladie des salariés de ces trois entreprises aux Etats-Unis, soit 1,2 millions de salariés et leurs proches. (plus de détails dans cet article de Forbes).
Et n’oublions pas qu’Amazon ce sont aussi des services cloud pour les infrastructures informatiques de santé. Ce 8 décembre, AWS (Amazon Web Services) a ainsi lancé Amazon HealthLake, qui permet aux professionnels de santé de stocker, transformer, rechercher et analyser des données de santé dans le nuage (communiqué AWS).
Séverine Godet