A moins de vivre sur une île déserte, sans wifi, vous avez certainement entendu parler du phénomène Animal Crossing. Cette série de jeux vidéo de « simulation de vie » dans un univers peuplé d’animaux anthropomorphes a été développée par Nintendo EAD et existe depuis 2001. Succès critique et commercial depuis près de deux décennies, Animal Crossing est devenu en mars 2020 un phénomène de société planétaire, avec la sortie en pleine pandémie de coronavirus de son 5ème opus – « Animal Crossing : new horizons ». Pour comprendre cet univers qui tient autant du jeu vidéo que du réseau social, explorons le pays de Tom Nook le tanuki cupide, Thibou le hibou conservateur de musée et Porcelette la marchande itinérante de navets.
Plus de 12 millions d’exemplaires
La sortie de « New Horizons » sur la console Nintendo Switch a bien sûr profité du confinement d’une grande partie de la population mondiale qui a boosté les téléchargements de jeux vidéo. Mais cette réussite s’appuie aussi sur le succès de la précédente franchise du jeu, « New Leaf », sortie sur la console 3DS en 2013 et vendue à plus de 12.45 millions d’exemplaires dans le monde. Et d’après les statistiques du cabinet américain NPD Group, tout juste un mois après sa sortie « New Horizons » aurait déjà dépassé les chiffres de vente de son précédent opus, donc plus de 12 millions d’exemplaires.
La période du confinement aura particulièrement bénéficié à Animal Crossing puisque ce jeu est en fait aussi un réseau social où les joueurs peuvent continuer de visiter leurs amis dans leurs îles virtuelles. Des mariages et fêtes d’anniversaires sont aussi désormais organisés au sein du jeu, ainsi que des expositions d’art ou encore des défilés de mode.
Plus de 28 000 abonnés fans de mode
Car Animal Crossing est aussi un paradis pour la fans de mode, puisque les joueurs peuvent s’amuser à recréer en pixel art leurs vêtements favoris pour habiller leurs personnages. Des créateurs talentueux reproduisent ainsi leurs articles de mode préférées et créent des modèles originaux que les autres joueurs peuvent récupérer gratuitement en copiant leur code. Un des comptes Instagram les plus suivis de « Animal Crossing DIY style » est @animalcrossingfashionarchive, avec plus de 28 000 abonnés. D’après le magazine lifestyle « Esquire », il existe désormais toute une galaxie de comptes plus ou moins « niche » dédiés aux styles de grandes marques comme Dior ou Gucci ou de créateurs comme Rick Owens, Martin Margiela ou Issey Miyake.
Les marques elles-mêmes commencent à être présentes au sein du jeu. L’e-shop de luxe Net-a-porter a ainsi collaboré avec des créateurs de mode chinois dont staffonly, Marchen, Calvin Luo, Short Sentence, et Shushutong pour créer les habits virtuels de leurs collections printemps-été. Ces “skins” sont offertes sur simple appel au service client et de vrais vêtements peuvent être achetés sur Tmall (anciennement Taobao Mall, appartient désormais au groupe Alibaba).
En France, la marque Gemo (groupe Eram) a organisé avec l’agence Rosbeef! un premier défilé de mode dans Animal Crossing, en partenariat avec le site féminin MadmoiZelle. Les mannequins Mymy et Marie étant les personnages de deux journalistes de la rédaction de MadmoiZelle.
Un univers pourtant 100% « brand free »
Mais attention, l’univers Nintendo reste culturellement déconnecté du marketing et de l’économie mondiale, même si l’économie locale joue un rôle important dans « Animal Crossing » avec l’échange et la spéculation notamment sur le cours du … navet ! Les marques n’ont ainsi aucun budget à débourser pour participer à Animal Crossing mais les opérations qu’elles y lancent doivent s’intégrer de façon organique au jeu (plus de détails et d’idées d’opérations « Animal Crossing » pour des banques, l’agriculture ou encore le tourisme dans cet article de The Drum). C’est ainsi que le musée Getty a créé son « Animal Crossing art generator » pour permettre aux joueurs de décorer leurs maisons virtuelles avec ses œuvres, en attendant de pouvoir retourner les admirer dans ses murs.
D’autres musées et institutions ont imaginé des démarches créatives dans « Animal Crossing » pendant le confinement, comme l’Aquarium de Monterey Bay ou encore le Museum of English Rural life (une référence en terme de community management à la fois culturellement pointu et « décalé » sur les réseaux sociaux).
Animal Crossing est donc un univers déjà riche et en continuelle expansion où les marques peuvent encore déployer leur créativité. Une exploration qui pourra aussi s’appuyer sur les évènements qu’organise désormais Nintendo au sein du jeu par exemple avec la célébration du International Museum Day du 18 au 31 mai, ou encore la thématique de la saison des mariages en juin (source Newsweek).
Séverine Godet