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Marques : quel content marketing à l’heure du Covid-19 ?

La crise sanitaire que nous traversons est sans précédent. Confrontées à cette situation inédite,  les marques ne savent comment orienter leurs stratégies de contenus dont la dimension marketing risque soudain de se déliter. Peut-on continuer, business as usual, avec quelques adaptations à la marge ? Faut-il au contraire tout repenser, placer ses pions pour marquer le territoire ; si oui, comment ? Doit-on a contrario tout mettre en stand-by en misant sur le silence ?  Beaucoup de questions, beaucoup de doutes, beaucoup de craintes ... et quelques pistes de réflexions pour un début de réponse ?

L’éclipse de la raison ?

Souvent en psychiatrie, les troubles anxieux se traduisent cliniquement par une agitation spontanée et excessive donnant lieu à des comportements incohérents. Or des comportements incohérents, on en voit actuellement beaucoup. En cette période d’épidémie, l’irrationalité brille sur l’Hexagone, chacun vivant ce point culminant selon sa propre échelle … et très souvent dans la démesure engendrée par la panique. Pour preuve, ces images de supermarchés dévalisés de leurs stocks de papier toilette.

Décidément, le coronavirus s’attaque aussi, de façon insidieuse, à nos cerveaux. Et les marques dans tout ça ? Elles tâtonnent, peinant à se positionner. Il y a celles qui font face au choc traumatique en produisant du contenu marketing à tout-va, de façon dispersée et anarchique, sans cohésion ni unité. Et puis celles qui misent sur un minimum de bon sens et de retenue dans ce qu’elles diffusent.  Fort heureusement, dirais-je – à une nuance près, mais je reviendrai dessus -  car ce sont ces contenus-là qui, in fine, émergeront.

Fondamentaux et mise en pratique

Mais qu’est-ce donc un bon contenu marketing, me direz-vous ? Délicate question en période de crise ... Je m’y risque, avec des pincettes : celui qui reste « viralisable » ( sans mauvais jeu de mots) ? Mais oh là là, prudence ! Prenez garde à votre approche ! On ne le répétera jamais assez : subtilité et bon sens sont de rigueur, à fortiori en période de crise ! Et pour cela, il faut :

  • Des contenus émotionnellement forts, certes …mais il ne s’agit pas de faire levier sur toutes les émotions. L’humour mordant, caustique, arme anti-crise par excellence, est à manier avec beaucoup de circonspection. Faut-il laisser ce privilège aux consommateurs lambda qui, il faut le reconnaître, n’ont jamais été aussi drôles, vifs et affûtés qu’en cette période de crise et d’actu intense ? Je vous pose la question. À méditer pour agir en son âme et conscience, il va sans dire...
  • De la pertinence et du contexte ? Évidemment, et plus que jamais ! C’est d’ailleurs un des principaux enseignements de cette crise sanitaire : il faut faire sens, toujours plus. Car il y aura un après Coronavirus ; tout devra alors être repensé. Un conseil donc : prenez de l’avance, démarrez dès à présent, la route va être longue.
  • Penser « devise sociale », le fondement même du partage en ligne des utilisateurs. Avez-vous seulement écouté, analysé les discussions de vos audiences ? Ont-elles envie que vous mettiez des contenus à leur disposition pour continuer à distiller leur expertise ? Des réflexions réconfortantes ? Peut-être des contenus utiles ?
  • Practicité et utilité : c’est précisément là que les marques pourraient avoir un rôle à jouer. Guide de survie pour les parents épuisés, recettes, cours de sport « version canapé », tutoriels et j’en passe ... Je vous pose la question : a-t-on déjà vu autant de contenus utiles circuler ? Personnellement, je pourrais passer ma journée à les consulter et les partager.

Car en cette heure dramatique, tout le monde veut être utile, apporter sa pierre à l’édifice, participer à la lutte anti-covid ... Talkwalker, solution de veille et analyse du web social, recense plus de 150.500 tweets localisés en France en lien avec le COVID-19 ... avec les mots « aider » et « aide » sur les 7 derniers jours (17-23 mars).

Des ressources pour « traverser cette crise » en toute sérénité, nous en avons beaucoup … bien plus que de raison ?

Hiérarchiser les contenus utiles 

Le trop est parfois l’ennemi du bien. Lisez ce thread sur Twitter de Stéphanie Laporte, co-fondatrice de l’agence social media OTTA elle prône carrément « une période de réserve respectueuse vis-à-vis de l’ampleur des événements ». Cette experte souligne que, dans le cas d’une sponsorisation des contenus, on fait augmenter les enchères au CPM « au détriment des institutions et associations qui diffuseraient des messages de prévention VRAIMENT utiles ». Un point de vue partagé par Olivier Cimelière, illustre blogueur et spécialiste en communication de crise qui s’interroge sur ces appels incessants à communiquer .... car, comme il le souligne, il s’agit d’une crise à part. Inédite. « Qui n’a rien à voir avec des crises « classiques », où l’entreprise a intérêt à être claire. » Sa recommandation : plus de sobriété. Se faire vecteur d’amplification de communications et contenus vraiment UTILES.

Mais, une fois encore : est-ce le rôle des marques de diffuser et partager des contenus utiles ? Ne risque-t-on pas la saturation et l’amalgame ? Malgré tous les efforts vertueux du monde, cette bienveillance est-elle dépourvue de toute considération mercantile ? Comment le public va-t-il la percevoir ? C’est à double tranchant, et je ne prendrais guère ce risque. Il serait plus pertinent de concentrer ces forces vives sur d’autres enjeux de communication essentiels en période de crise, notamment pour la communication interne. Pivoter, oui... peut-être ? Après tout, toute crise met en lumière les fondations peu solides.

Se recentrer pour penser à demain

L’heure est donc aux choix : produire des contenus ou s’abstenir ? Cette décision vous appartient ; c’est à chaque marque de prendre ses responsabilités, d’agir en son âme et conscience, comme nous vous le disions précédemment. Un conseil toutefois, peu importe le choix que vous aurez fait ; observez, prenez du recul et pensez à demain. Regardez la Chine qui sort progressivement de son confinement. Bien sûr, il y aura de nécessaires adaptations culturelles à réaliser, mais quels sont les premiers enseignements à tirer ? Peut-on faire des projections ?

Havas Chine vient d’éditer le rapport Corona Market Virus update dont l’update du 13 mars 2020 est particulièrement riche en insights. On y relate de nouvelles habitudes que les consommateurs ont développées à la faveur du confinement, notamment en matière de sécurité et de santé. 52 % des personnes interrogées affirment qu'elles ont commencé à se concentrer sur la santé et les produits susceptibles de renforcer le système immunitaire, 41 % qu'elles préfèrent désormais les produits écologiques et biologiques et 35 % que les produits frais et sûrs sont plus importants que jamais pour elles. En outre, 30 % ont déclaré vouloir désormais acheter des marques "rassurantes".

Regagner la confiance : une injonction entendue, mais peut-être pas réellement écoutée ? Si en cet instant, tout nous semble bien sinistre, rappelons-nous : après le pluie vient le beau temps. Des opportunités, il y en aura. Le digital, en mutation permanente, nous a appris qu’il fallait faire preuve d’adaptabilité et de résilience. Pour l’heure, restez au chaud, réfléchissez et recentrez-nous ; vous n’en serez que meilleur demain quand il faudra tout reconstruire.

MD

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