Salle comble et 200 burgers distribués au food-truck de Yahoo, comme chaque année les rencontres de l’Udecam ont marqué la rentrée des classes de la publicité et du marketing digital.
Au cours de la journée, on a pourtant tourné à pas prudent autour de la question de la valeur ou plutôt des valeurs comme on entoure un animal blessé. Avec, au final plus de questions ouvertes que de réponses.
Retour en 5 points sur les rencontres Udecam 2015 :
En ouvrant la session de la 5ème édition des recontres udecam 2015, Jean-Luc Chetrit Président de Carat a détaillé les composantes essentielles de la valeur et de la responsabilité dans nos métiers. Sur ce sujet central – fil rouge de la journée D Day for value – les 28 agences media de l’Udecam ont “un rôle historique à jouer” bien au-delà de la simple optimisation media pour «donner vie à l’idée».
Au menu, hybridation (ces agences créas qui créent un département média, ces agences média qui développent une expertise créa), l’investissement dans l’humain (cf. la formation Essec/Udecam), le respect des créateurs et l’innovation via l’investissement dans les startups.
1- Old media/New Media et nouveaux hybrides : entre choc positif, innovation et communautés
« Etre acteur plutôt que miroir » c’est la nouvelle frontière de Nonce Paolini, Président de TF1. Côté valeur, les médias et TF1 en tête ont fait leur mea culpa et pris leurs responsabilités sur le traitement de l’info et le nécessaire optimisme ou rééquilibrage dans la restitution.
Côté business, les investissements médias sont toujours dangereusement éloignés de nos homologues, Pierre Conte de GroupM rappellera que nous sommes à 60% des dépenses publicitaires des Allemands. En écho, Ludovic Lecomte, Président du Groupe Bel et de l’UDA rappellera aux annonceurs que « La crise est le meilleur moment pour investir »
Côté capitalisme media, le constat général de cette journée reste le même : les pure players et les Gafas bouleversent l’écosystème des médias et de la pub. Dans ce nouveau monde, il n’y a plus de citadelles imprenables comme le montre la montée en puissance de Buzzfeed et Vice Media. « Le contenu s’est affranchi des contraintes du temps » rappellera, plus tard dans la journée Béatrice Mandine d’Orange. En bref, le consommateur veut des contenus où il veut quand il veut, « L’utilisateur choisit » comme le résumera Nick Leeder de Google .
Marie Laure Sauty de Chalon après avoir ressuscité l’evergetisme, parlera de communautés médias et de l’extension d’au féminin autour de «Communautés d’addicts» :
“Un média n’est plus un support physique, un média est une communauté. Au féminin n’est pas un site » Marie-Laure Sauty de Chalon.
Autre avertissement de Nick Leeder de Google à destination des médias statutaires « Les talents ne font plus de distinctions entre le on et le off »
Côté publicitaire, Cedric Siré de Webedia, piquant, fera aussi remarquer aux médias audiovisuels que les médias digitaux permettent désormais « en temps réel, de calculer une valeur pour les marques moins abstraite que celle de la TV »
Mais les vieux médias accélèrent leur digitalisation et rugissent encore. « La TV est un dinosaure capable d’agilité» clame Emmanuel Chain d’Elephant & Cie tandis qu’ Olivier Abecassis de TF1 rappelle que « la TV n’est pas morte elle a juste des enfants ». Plus tard dans la journée, Christopher Baldelli de RTL en phase avancée de «déportalisation » fera même remarquer à Nick Leeder que 78% des 13-24 ouvrent la radio contre 58% une vidéo sur Internet.
Nouvelle arbitre de la valeur Bernard Mourad d’Altice Media, nouveau consolidateur du paysage media français évoquera de son côté, la riche histoire longue de quatre siècles de la presse écrite. Il développera aussi le problème de l’abondance de l’information actuelle, l’impératif d’explication et de compréhension du monde du public et la nécessité de groupe médias puissants.
2- Data : de la valeur de constat à l’asset stratégique
Le marché de la data est évalué à 1,4 milliards d’Euros par Mediapost, rappellera Jérémie Bugard d’Agence79 en introduction de la table ronde.
Rolf Heinz de Prisma Media expliquera dans un Français parfait comment l’intelligence de la data révolutionne tous les métiers des médias en autorisant des expériences uniques et personnalisées.
Même constat chez Romain Roulleau chez Accor Hôtel qui souhaite à l’instar d’ AirBnB offrir des expériences non standardisées et utilise le digital dans le parcours client en amont et en aval (NDLR : on a pas encore de stats sur sa nouvelle place de marché mais selon lui la martketplace Accor ouverte aux autres hotels le 24 juillet sur Paris devrait accueillir plus de 300 indépendants fin 2015).
Jean-Philippe Maheu de Twitter préfère de son côté parler de signaux (consumer insight/ souhait/désir/intérêt) destinés à enrichir marketing de l’instant (Cf. la campagne Dove #speakbeautiful).
Pour Alain Lévy, CEO de Weborama, les données sont un asset réellement stratégique « la data est un nouveau mode de pilotage de l’entreprise et pas seulement des médias. ». Une bonne stratégie data consiste donc à identifier, organiser, exploiter et in fine augmenter la data.
Augmenter la data ? c’est ce que fait Olivier Abecassis de TF1 qui a découvert 15 à 20% d’inscrits jumeaux statistiques proche de son cœur de cible.
3- Jean Marie Messier et la Convergence : « retour vers le futur »
20 ans après Jean Marie Messier aujourd’hui banquier d’affaire revenait avec un humour distancié sur l’insight, la fameuse convergence, qui avait précipité sa chute de Vivendi il y a 15 ans.
“Il y a 15 ans Google et EBay ne remplissaient pas les critères pour être admis à Davos” rappelait-il, ingénu, en introduction.
Mais pour Jean-Marie Messier, le débat contenus/tuyaux est aujourd’hui archaïque car la technologie est passée par là. Google, Amazon procurent une expérience simple d’accès au contenu, les réseaux sociaux « ne sont plus une mode mais un mode de vie ». Par ailleurs nos amis les Gafas ont la data et dominent le Cloud.
Selon lui les Pure players (AirBnB, Uber) et les acteurs OTT (Google Alphabet en première ligne) offrent l’ubiquité au consommateur.
Ils ont donc une longueur d’avance « Ils n’ont pas de silos et ils ont le cloud ». Or « Le Silo tue » insiste Messier.
Dans la mère des batailles qui est la bataille de l’accès au consommateur, « si le contenu est roi, la distribution est reine ». Un constat d’autant plus vrai lorsque dans notre snack society et à l’heure ou l’usage remplace la propriété.
Prochain affrontement décisif sur les lignes de front médias : l’exclusivité des contenus dans la lignée Exclusivité/Rareté/live un champ sur lesquels (Apple et Amazon ont pris une longueur d’avance)
Dernier avertissement de Messier : « les OTT sont cannibales vis-à-vis des startups ». Pour lui, Les projets de Gafa en matière d’Internet des objets (IOT) et réalité virtuelle et d’intelligence changeront le rapport à la vie. Dans ce marché winners takes all « Aucune Industrie n’est à l’écart ». Nous sommes prévenus.
4- Le mobile, premier écran
Signe de l’accélération mobile : 10% du temps smobile seulement est passé sur les navigateurs selon Flurry/yahoo. L’usage mobile c’est 73% de l’usage de Facebook rappellera Benjamin Lequertier Directeur Marketing Europe du Sud de Facebook, il était pratiquement nul avant l’IPO de Facebook.
Le mobile est devenu l’objet central du lien avec le consommateur. « Le mobile permet de repenser le service à partir du client » insitera Bertrand Mabille de Carlson Wagon lit Travel. CWT réalise actuellement 15% des achats sur le mobile
5- Fuir la valeur de peur qu’elle ne se sauve. We need to talk about…les Adblockers
Lors des rencontres Udecam, on aura prononcé que 5 fois le mot Adblocker, rarement le mot visibilité ou le mot fraude, à peine le mot transparence et 3 fois le mot Sapin sur l’ensemble de la journée…Le sujet est pourtant urgent si l’on veut sortir par le haut d’une situation de Crise.
Et pourtant…« Alerte au tsunami » insiste Pierre Chappaz de Teads qui rappelle que 61% des Internautes Allemand -patrie des Adblockers de notre ami Eyeo- bloquent le Pre-Roll video sur mobile.
« Les Adblockers sont un défi à la qualité. »
Plus que jamais l’ensemble de l’écosystème digital : agence, médias, plateformes d’Adtech doit proposer une expérience de marque engageante et non intrusive pour sortir par le haut de ce rejet massif comme le rappelait Andy Brown de Kantar Media plus tôt dans la matinée « La pub doit être une amélioration pas une interruption »
Beaucoup de questions donc en cette journée de rentrée et des réponses à réinventer lors des rencontres Udecam 2015.
Le mot de la fin revient à Pierre Conte, Président de GroupM France « l’ére du customer centric impose déjà d’avoir de la modestie ». Et « l’hybridation c’est déjà une forme de partage de la valeur… ».
Les agences n’ont pas dit leur dernier mot…