Yann Depoys est Directeur Europe de la Publicité de eBay. Il évoque pour nous la forte valeur générée par le programmatique depuis son lancement et ses projets en la matière.
Un témoignage très éclairant d’un leader du digital, sur les bouleversements en cours et en profondeur de la publicité en ligne.
La régie publicitaire d’eBay a lancé la publicité programmatique il y a 2 ans : où en êtes-vous aujourd’hui ?
Les résultats sont très concluants. Deux chiffres en témoignent :
– notre chiffre d’affaires publicitaire tous canaux confondus (régie, opé spé, multinational et programmatique) a progressé de + 40% (Q4 2013 vs Q4 2012)
– les CPM programmatiques ont aussi très fortement progressé, de + 60% et sont désormais très compétitifs vis-à-vis des campagnes premium commercialisées par notre régie ou en direct
Et ces chiffres ne concernent pas le mobile qui n’est aujourd’hui pas monétisé
Nos revenus publicitaires sont désormais composés à 70% de programmatique (contre 30% pour l’achat publicitaire classique).sachant que nous sommes partis de zéro dans le programmatique il y a 2 ans. C’est donc une complète transformation de la nature et la structure de notre activité publicitaire que nous avons du mener.
Aujourd’hui, les annonceurs ROIstes constituent 80 % de nos revenus.
Cette progression s’explique en partie par notre contexte spécifique et notre audience constituée d’intentionnistes en posture d’achat. Les taux de transformation sur eBay sont supérieurs à la moyenne, et le niveau d’engagement des utilisateurs est très élevé, en termes de temps passé (45 minutes à 1 heure par visiteur unique et par mois, quand la moyenne est de 10 à 15 minutes pour la majorité des sites ecommerce), de nombre de pages vues, et ce sur une grande diversité de produits.
Quelles ont été les étapes du programmatique chez eBay?
Nous avons lancé la vente de publicité display « classique » en 2008, avec une régie et en direct.
En 2009, nous avons commencé à travailler avec des adnetworks, car il était difficile de monétiser la totalité de notre inventaire publicitaire avec des campagnes premium seulement : il y avait en effet beaucoup d’invendus, étant donné que nous avons beaucoup de pages vues par visiteur unique.
L’activité arrivait à un plateau en 2010 avec, comme effet conjoint, le début de la migration de l’audience vers le mobile (aujourd’hui nous faisons plus de 20 % des transactions sur le mobile).
C’est à la fin de l’année 2011 que nous avons pris le virage du programmatique, d’abord avec Google Adex ; nous avions en effet DART [de Doubleclick, racheté par Google] et l’intégration avec Google AdEx est du coup optimale.
Nous avons obtenu des revenus incrémentaux immédiatement, provenant en premier lieu des retargeters et des annonceurs Adwords.
Puis nous avons implémenté le SSP Rubicon au troisième trimestre 2012, en parallèle de Google AdEx. Cette plateforme complémentaire a encore accéléré notre croissance et s’est révélée très complémentaire avec Google AdEx.
Quelle est votre approche aujourd’hui en matière de publicité programmatique ?
Nous allons vers une maximisation concurrentielle de la demande sur notre inventaire, nous sommes agnostiques concernant les réseaux et solutions. Nous avons testé différents SSP et nous en testons trois nouveaux ce premier trimestre 2014. Ils seront peut-être complémentaires et pourront être éligibles pour monétiser notre inventaire également.
Nous avons par ailleurs développé des private deals avec des trading desks comme Cadreon, Amnet, Xaxis…
Nous ferons des expérimentations sur de la pub avec des ciblages très fins (comme par exemple le ciblage par mot-clé), mais nous voulons une solution simple et packagée, à l’image du retargeting.
Ce type de solution sera dans un premier temps proposé à nos vendeurs, quitte à ouvrir à d’autres après.
Comment abordez-vous la data ?
Aujourd’hui nous ne vendons pas de data, nous l’utilisons à des fins propres. Nous exploitons nos données first party, issues d’un contexte de navigation, lié au profil utilisateur, par exemple les femmes de 25 à 35 ans (nous avons en effet des profils enregistrés), ou liée à un comportement d’achat.
Nous avons 30 segments disponibles sur la plateforme Rubicon et nous pourrions en établir plus à la demande, mais ce volume est efficient opérationnellement.
Le sujet de la vente de la data n’est pas fermé, mais l’option la plus vraisemblable, plus que de la data seule, serait de bundler la data avec du média, un peu comme un adexchange, en retargetant nos data sur d’autres média.