Les entreprises ne viennent pas de découvrir la data ! Ce qui a changé, en revanche, sur le marché, c’est la capacité de collecter, structurer et exploiter rapidement les données internes et externes, ceci à des coûts devenus raisonnables.
On peut désormais exploiter la data média pour optimiser au centième de centime d’euros au niveau de chaque page affichée sur un site internet.
Nous arrivons donc dans un nouveau monde où le rêve ultime du Directeur Marketing (qui est d’afficher son message au bon moment, au bon endroit, à la bonne personne et au bon prix) est consubstantiel à l’évolution du digital.
Les questions qui se posent désormais autour de la data sont dès lors : comment créer et valoriser l’actif data de l’entreprise ? Avec quels types de données travailler ? Comment les combiner à des données externes ? Et surtout : comment organiser l’entreprise autour de la data ? C’est-à-dire : comment faire fonctionner mes « data operations » entre l’IT, le marketing, le média et le CRM ?
La question data se pose aussi bien à l’intérieur de l’entreprise que sur son marché. Je constate chaque jour que les partenaires ou les investisseurs des grands groupes commencent à interroger les PDG sur leurs stratégies data.
Comment s’organiser ?
En premier lieu, Il faut considérer la data comme un actif en développement. De la même manière que la valorisation des entreprises comporte un «brand goodwill», elle comportera demain un «data goodwill». Je conseille aux dirigeants d’internaliser au maximum sa gestion, comme ils l’ont fait pour l’actif de marque il y quelques années. En bref, l’appropriation de l’actif passe par l’internalisation.
Une fois le bon niveau de priorité établi au sein de l’entreprise, il faut localiser la data, car les détenteurs de la donnée sont multiples. Il est également nécessaire de se doter des technologies «Big Data» qui permettent de collecter, organiser, et stocker ces données.
Avec quel département ?
Le Directeur Marketing ne peut pas gérer tout seul cette problématique.
L’impact organisationnel d’une stratégie data implique, au minimum, le marketing, l’IT, la stratégie et le juridique. Le projet data est intimement lié à l’ADN de l’entreprise.
Par ailleurs, beaucoup d’entreprises sont encore organisées en silos et les blocages autour de l’ «actif data» laissent le champ libre à des acteurs ou des pure players plus agiles, capables d’agir sur les données plus rapidement, mais aussi de modifier leur politique de développement produits en se fondant sur l’exploitation des données en temps réel.
Ainsi, il revient à la direction générale d’impulser les nouvelles stratégies data de l’entreprise et d’examiner deux questions essentielles : quelles données vais-je exploiter en interne ? Et : quelles données je ne vais pas exploiter en attendant une clarification juridique ?
La valeur du test
Nous n’en sommes qu’aux prémices de l’exploitation des données par les entreprises.
Plutôt que de construire des usines à gaz bâties autour d’un cahier des charges que les acteurs de l’entreprise découvrent a posteriori, je recommande aux dirigeants de prendre le projet à l’endroit et de commencer par des tests simples, à échéances brèves, et dont l’efficacité peut être mesurée. On commencera généralement par le pilotage des investissements display par la data.
Dans ce cadre, un cycle court de type éducation-expérimentation permet d’obtenir des résultats, un «proof of concept» et un retour sur investissement à court terme, généralement en moins de trois mois.
Education
La première étape du projet, la partie « éducation », consiste à réunir les différents départements responsables de la stratégie data et de convaincre l’ensemble des parties prenantes de l’intérêt et des objectifs du projet afin de travailler ensemble. Les questions à aborder tourneront à ce stade autour du partage de la valeur : par exemple, si le CRM doit contribuer et que le media pilote le ROI, comment répartir le fruit des efforts ?
Expérimentation
La deuxième étape est l’expérimentation. Elle consiste à multiplier les expériences pour évoluer vers un projet «Full DMP*» mixant données internes enrichies de données externes et dont l’objectif est d‘établir des segmentations pour piloter l’ensemble des leviers de l’entreprise (Media, Site, Stratégie, Marketing de conquête et de fidélisation).
A terme, le projet permettra de remonter au marketing les insights clients et intentionnistes et ajuster la politique de création et de développement produit.
L’actif data
A ce stade, les entreprises auront bâti une première base de données vivante, un premier «actif data» qui accumulera de la valeur jour après jour et permettra de donner corps au projet plus large de Big Data.
Je reste persuadé que cette démarche brique par brique est la meilleure manière d’accéder au «Grand Tout». Elle permet également de capitaliser sur l’existant et de l’enrichir en prolongeant ses segmentations clients sur les canaux digitaux.
Je suis convaincu que les cinq années à venir seront les années de la donnée et que les entreprises agiles sur le digital peuvent par ce biais enrichir et exploiter les leviers existants. Certaines commencent déjà à piloter leur site et leur CMS via la donnée. Il faudra pour ce faire s’entourer de data scientists (experts en algorithmes et en traitement de grands nombres). A cet égard, je m’attends à une pénurie de statisticiens, déjà « captés » par les pure players.
Le temps est compté. Il est l’heure de prendre des décisions .
*DMP – Data Management Platform