Avant de plonger dans l’univers de la Web Analyse, chacun, chacune d’entre vous a pu se forger une opinion sur cette discipline qui prend place dorénavant systématiquement dans les projets digitaux. Voici, basé sur une expérience de plus de 7 ans dans la mise en place de projets de Web Analyse, notre « best of » des 5 mythes ou fausses interprétations les plus fréquemment rencontrés.
1- Mythe n°1 : l’outil est important
Un outil, par défaut, ne sert à rien. Il n’a d’utilité que s’il répond à un besoin. Sans besoin exprimé, comment savoir si vous avez besoin d’un marteau ou d’un tournevis ? Une des premières erreurs en Web Analyse consiste donc à penser que le débat commence par le choix d’un outil, outil supposé répondre à toutes les questions – connues ou inconnues – relatives aux opérations digitales.
Le choix d’un outil ne se fait pas sans une expression de besoins réalisée au lancement du projet. Pour faire simple, vous pouvez questionner les membres de votre organisation : “qui a besoin de quoi et quand ?”. Puis de bien définir le quoi : est-ce vraiment à la Web Analyse d’y répondre ? Si oui quel est le périmètre, le mode de calcul ? Avez-vous vraiment besoin du temps réel ?
Et seulement après cette étape, posez-vous la question de l’outil. Quel est celui qui répondra le mieux à votre problématique et à vos besoins pour mesurer les opérations à mener et pour vous aider dans la prise de décision ?
L’outil n’apportera jamais de réponses pertinentes et spécifiques si vous n’avez pas prévu avant sa mise en place les questions pertinentes et spécifiques auxquelles il doit répondre.
Donc ne plongez pas dans les outils en premier lieu mais plutôt dans votre métier et vos opérations que vous menez pour l’appliquer sur le Web.
2 – Mythe n°2 : l’outil sera utile.
Vous avez choisi le bon outil à l’étape précédente ? Bravo. Maintenant, il convient de le mettre en place correctement et de s’en servir.
Je dis parfois que la Web Analyse est aux opérations digitales ce que le contrôle de gestion est à la vie d’une entreprise.
A l’image du contrôle de gestion, il vous faut donc maintenant mettre en place des processus et des personnes, les fameux contrôleurs de gestion (ou Web Analystes, internes ou externes) qui vont vous apporter d’abord une stabilité dans le temps de la Web Analyse (car vos actifs internet changent, évoluent et l’outil doit suivre) et enfin du grain à moudre pour rentabiliser l’investissement en Web Analyse. Sinon, l’outil partira en déshérence, vous l’accuserez d’être inutile et désirerez en changer (retour au mythe n°1), alors qu’il n’y est pour rien le pauvre.
Donc n’attendez pas d’activer un outil pour appréhender son pilotage.
3- Mythe n° 3 : le Web révolutionne mon métier.
Hormis les « pure players » sur des missions nées avec Internet, le Web ne change pas le métier d’une entreprise ou la mission d’une organisation. Un projet de Web Analyse doit avant tout servir des objectifs « métiers ». Ainsi, le travail sur la Web Analyse ne doit pas se concentrer sur la mesure d’indicateurs spécifiques à l’univers du Web (le nombre de pages vues, le taux de rebond, le nombre de “like” etc.) mais doit avant tout refléter les indicateurs métiers de votre entreprise. Interrnet est à votre service et non pas l’inverse.
Présent sur le Web, un constructeur automobile s’intéressera plus probablement au nombre de
visites en concession, de ventes de services ou de demande d’informations que le site génère plutôt qu’au nombre de visiteurs uniques qu’il draine grâce à une campagne AdWords. Et nous attendrons du site qu’il génère un nombre de contact à un coût donné comme vous évalueriez un commercial de terrain.
Donc le Web ne change pas la mission de votre entreprise, il est simplement à votre service pour la réaliser. L’’outil de Web Analyse que vous utilisez, choisi sur vos besoins métiers, doit vous apporter des données qui reflétent avant tout votre activité.
4- Mythe n° 4 : les données doivent être exactes.
C’est l’un des plus gros mythes de la Web Analyse car 5 outils d’analyse vous donneront 5 résultats différents. Par ailleurs, toute mesure contient sa part d’erreur (un thermomètre vous donne une idée de la température mais jamais sa valeur exacte). On oublie souvent que les données ne sont qu’une représentation de la réalité et chaque outil dispose d’un ensemble de présupposés pour représenter cette réalité (comme une carte qui représente un territoire).
La recherche de l’exactitude est alors illusoire et peut faire passer à côté de raisonnements plus importants : que puis-je apprendre de l’action que j’ai entreprise ? A-t-elle été bénéfique pour réaliser mon métier ? Sur la base de cet enseignement, que vais-je entreprendre ensuite ?
Donc assumez une certaine marge d’erreur et passez à l’action.
5- Mythe n° 5 : il faut être à la pointe.
Souvenez-vous de l’engouement marketing de « Second Life » et plus près de nous de la course aux fans Facebook. En Web Analyse, le “big data” est à la mode, or dans bien des situations, il n’y a pas besoin de « big data » (ni même de « data » tout court) pour intégrer que certaines situations sont mécaniquement et considérablement défavorables au développement de vos activités.
Je n’insinue pas que les nouvelles approches type « big data » sont inutiles et bien au contraire : elles complètent une panoplie d’autres outils plus usuels et sont bien plus adaptées dans certaines situations assez spécifiques.
Mais lorsque les pages d’un site e-Commerce mettent 15 secondes un jour sur deux pour s’afficher, quand vous seul comprenez comment votre site fonctionne, a-t-on vraiment besoin d’un outillage extrêmement sophistiqué pour réaliser que cela a une conséquence négative sur la raison d’être de ce site ? Et combien vous fait perdre la demande d’informations intrusives et personnelles dans votre parcours d’achat ? Et souhaitez-vous vraiment que vos prospects aillent sur les réseaux sociaux avant qu’ils soient devenus clients ? Et oui, certaines des dernières inventions du Web peuvent se révéler parfois inutiles.
La liste serait longue pour parcourir l’ensemble des standards, conventions et bonnes pratiques que l’on ne retrouve pas toujours dans les sites que nous parcourons tous les jours.
Il me semble que la plupart des outils « courants » de Web Analyse peut répondre à vos problématiques. Alors, attention aux vendeurs de complexité, entre l’expertise et l’imposture il n’y a parfois que du jargon.
Donc ne vous laissez pas séduire par une modernité supposée, assurez les bases et à chaque niveau !
En conclusion, l’outil n’a donc pas un rôle primordial surtout si personne ne s’en sert régulièrement. Il vous représentera la réalité selon sa propre définition et celle de votre expression de besoins. Vous devrez interpréter cette réalité et assumer une marge d’erreur dans votre analyse et vos prises de décisions. Enfin, avancez pas à pas, en prenant appui sur des bases solides, maîtrisées, avec des méthodes robustes à défaut d’être à la pointe.
Avec ces 5 principaux écueils à éviter avant de vous lancer dans la Web Analyse, vous abandonnerez une part de rêve mais vous serez armés, j’en suis sûr, pour tirer de la “data” toute la valeur qu’elle peut apporter à votre métier sur le support Web.
Ancien Web Analyste de Google. Sébastien Manaches a fondé en 2009 Wasabi Analytics, premier Cabinet de Conseil 100% analytics.