Nous inaugurons aujourd’hui notre série consacrée aux agences de Social media avec l’interview de Thomas Jestin, co-fondateur de l’agence KRDS, pionnière du Facebook Marketing en France (Ndlr : Axa Private Equity vient de rentrer à hauteur de 20% du capital dans KRDS).
Viuz : Présentez nous KRDS ?
Thomas Jestin : Nous avons fondé KRDS (les initiales des noms de jeunes filles des mères des fondateurs) en 2007 avec 3 associés : Antoine Sandrin, Thomas Guenoux et Guillaume Simon. Je suis notamment en charge avec mon associé Antoine de la direction stratégique et commerciale de l’agence. Nous avons démarré notre carrière d’entrepreneurs avec la volonté de construire un Facebook français, Cancoon, dès 2007 puis avons construit une application Cursus qui permettait de retrouver ses anciens camarades de classe. L’application a vite dépassé les 100.000 utilisateurs en quelques semaines et nous avons eu l’idée de proposer nos services aux marques en commençant par Eurosport.
Aujourd’hui KRDS compte 50 personnes et a réalisé à ce jour plus de 300 campagnes sur Facebook pour plus de 100 annonceurs tels que Danone, Peugeot, L’Oréal, Dior, Renault, Citroën.
VIUZ : Quelles sont les composantes d’une bonne stratégie de social media ?
Thomas Jestin : Si l’on rationnalise je dirais déjà que Facebook devrait représenter 95% des budgets social media en France pour refléter son poids dans les usages. Même pour la vidéo, beaucoup trop d’attention est encore accordée à Youtube/Dailymotion, Nike par exemple avait fait le choix audacieux de la plateforme vidéo Facebook au moment de lancer leur nouvelle pub avant le mondial de foot en 2010, bilan : une des vidéos de marque les plus virales de l’histoire et plus d’un million de fans gagnés en un weekend. Plus globalement, l’objectif du marketing facebook est simple : gagner des Fans, parler à ses Fans et vendre à ses Fans.
Ainsi, avant de parler à une communauté il faut se doter d’une communauté, et donc gagner des Fans. Il faut pour cela prévoir un budget Facebook Ads et un budget Application en particulier si la marque n’est pas connue. Il faut ensuite se doter d’un Community Manager qui prendra la parole au nom de la marque. Nous disposons chez KRDS d’un pôle de Community Management et nous fonctionnons avec une base de freelances assez large si le client ne souhaite pas internaliser la compétence.
Un des enjeux du community management est d’optimiser son Edgerank (l’algorithme du newsfeed Facebook), en parvenant à impliquer ses fans, c’est-à-dire en les poussant à commenter et à «liker» ses publications Facebook.
Viuz : Quelles sont les bonnes questions à se poser avant de publier une page Facebook ?
Thomas Jestin : Ce qu’il est très important de comprendre dans le Facebook Marketing c’est que la plupart des interactions entre une marque et ses fans se font sur la page d’accueil des fans et non sur la page de la marque elle-même, et que je ne suis pas pas tant en concurrence avec une autre marque qu’avec les amis de mes Fans au sein de leur flux d’actualité (NewsFeed).
Il faut donc poster du contenu ludique ou intéressant, du contenu qui donne envie d’être partagé (« je like », « je commente », « je « share »). Il faut que ce contenu soit bref et percutant car l’attention de mes fans est limitée. Il vaut mieux 10 vidéos de 1 minute plutôt qu’une vidéo de 10 minutes.
J’ajouterai enfin que l’objectif principal n’est pas seulement l’inflation du nombre de Fans mais la capacité sur 4 ans à travailler une base de Fan. Les retours de la publicité Facebook sur sa base de Fans (versus sur des utilisateurs indifférenciés) sont sans comparaison. Le « Facebook Marketing » c’est du Long terme.
VIUZ : Quels “Metrics” utilisez vous pour mesurer le succès ?
Thomas Jestin : Nous faisons du “sur mesure” selon les besoins de nos clients.
Nous surveillons bien sûr le nombre de Fans (parmi nos opés : +250k fans en 10 jours pour AirFrance, +300k fans en 45 jours pour Danette, en association avec Havas pour l’achat média) mais aussi le coût par Fan. Pour ce qui est du community management, nous regardons le nombre d’impressions des posts, le taux de feedback. Nous disposons d’un outil qui s’appelle le Page kit et permet à nos clients d’avoir accès pour leur page Facebook à des statistiques plus granulaires : meilleurs posts, nombre de commentaires, nombre de likes, meilleur timing de publication. Dans le cadre de jeux ou d’applis transactionnelles, nous surveillons aussi les MAU (utilisateurs mensuel) et DAU (Utilisateurs quotidiens), le « Sticky Factor » (taux de fidélisation), le nombre de formulaires remplis, de clics sortants, L’ARPPU (Revenu moyen par utilisateurs payants), etc.
VIUZ : Quels sont les éléments essentiels du F-commerce ?
Thomas Jestin : une F-boutique sur sa page est un plus si elle est conçue sur mesure (cf ce que nous avons fait sur la page de David Guetta), mais il faut plutôt d’abord chercher à enrichir son site d’e-Commerce au parcours bien rôdé de fonctionnalités sociales, c’est ce que recommande Facebook. Cela se fait a minima à l’aide des Facebook Social Plugins, le « share post purchase » est par exemple des plus efficaces (cf Ticketmaster). Nous recommandons également à nos clients de « Tagger » leur catalogue à la sauce Facebook, c’est-à-dire de transformer chacun de leurs articles en vente sur leur site en objets de “l’OpenGraph” afin de profiter au mieux des fonctionnalités virales Facebook Like, Send et Comment.
Nous pensons enfin que « Facebook Connect » et la simplicité que cela induit pour les utilisateurs en termes d’inscriptions et de partage permettra à terme une personnalisation extrême du web. Amazon US est en pointe sur ce sujet. Facebook Connect nous permet d’emmener notre identité et nos amis partout où on va, et sans friction. Demain, il y a fort à parier que Facebook adaptera ses marges sur les FB Credits pour attirer les e-tailers de tous bords et nous permettre d’acheter sans effort avec notre porte-monnaie Facebook aux quatre coins de Facebook, du web et même en dehors !
VIUZ : Que pensez vous de Google + ?
Thomas Jestin : Google + valide le concept Facebook. Cela pousse également Facebook à être plus innovant et plus à l’écoute des marketers et développeurs, nous nous en félicitons. Nous observons avec intérêt, mais actuellement G+ ne rivalise pas avec Facebook et ses 20 M d’utilisateurs en France dont 10 M qui reviennent chaque jour. G+ est sexy mais ne m’apporte pas assez de valeur en plus de ce que fait déjà Facebook pour que j’abandonne mes 150 amis et mes 4 ans d’archives photos pour repartir de zéro. Là réside à mon avis l’obstacle rédhibitoire pour G+.