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Disruption(s) dans la banque : Prêt d’Union, le spécialiste français du crédit entre particuliers

Disruption(s) dans la banque : Prêt d’Union, le spécialiste français du crédit entre particuliers, pourrait, d’après nos estimations, valoir 100 millions de dollars (… avant de se lancer en Europe).

Nous démarrons une sèrie "disruption(s) dans la banque". Actualité oblige : le leader mondial du crédit peer to peer Lending Club va bientôt s’introduire en bourse, et vise une levée record de 500 millions de dollars, un montant digne des grandes stars du tech.  L'industrie bancaire, plutôt bien protégée jusque là, pourrait à son tour ne plus résister  aux poussées de la digitalisation.

Aujourd'hui, nous donnons la parole à Charles Egly, co-fondateur de Prêt d’Union, dont nous estimons, d’après nos recherches et au regard du prospectus d'IPO de Lending Club, la valeur proche de 100 millions de dollars, un chiffre prometteur, puisque Prêt d'Union opère à ce jour en France seulement. Ce chiffre ne nous a pas été confirmé par Prêt d’Union et/ou ses actionnaires.

Prêt d’Union : comment çela fonctionne et où en êtes-vous ?

Prêt d’Union est une plateforme internet de « peer-to-peer lending » (« crédits entre particuliers ») qui permet à des investisseurs-prêteurs (personnes physiques et morales) de financer directement les crédits à la consommation de ménages français. Prêt d’Union, de par son modèle 100% internet de désintermédiation bancaire, élimine toute la complexité et les coûts du système bancaire traditionnel pour offrir aux investisseurs-prêteurs des taux de rendement attractifs et aux emprunteurs des taux de crédit compétitifs. Nous avons immatriculé la société en septembre 2011 mais nous n’avons ouvert la plateforme au public que fin 2011.

De fait, nous avons mis deux ans à être agréé Etablissement de Crédit et Prestataire de Services d’Investissement par l’Autorité de Contrôle Prudentiel et de Résolution (ACPR) et l’Autorité des Marchés Financiers (AMF). Obtenir ces agréments est une étape indispensable en France pour opérer une plateforme de « peer-to-peer lending ».

L’obtention de l’agrément demanda un très gros travail d’explication et de conviction auprès des autorités de tutelle. C’était la fin de la crise financière, les régulateurs étaient très frileux et prudents, notamment en France.

Mais aujourd’hui, nous sommes les seuls à avoir un agrément, ce qui nous donne un avantage concurrentiel certain.

Le service est de « pair à pair » mais avec certaines restrictions. Pour prêter, deux critères sur les trois critères suivants doivent être observés :

- le prêteur doit avoir l’habitude de gérer son épargne, ce qui est typiquement le cas lorsqu’il détient par exemple un compte titre dans une banque en ligne,

- il doit avoir exercé durant au moins un an un métier lié à « l’argent« (par exemple un gérant de société, un comptable, un trésorier, etc.)

- il doit avoir un patrimoine financier d’au moins 500 000 euros

Nous avons levé au total 18 millions d’euros d’equity depuis le début, un montant qui nous a permis de recruter une équipe composée aujourd’hui de 60 personnes, et d’investir en marketing (e-mailing, recrutement de leads, publicité Facebook).

De fait,

- Nous comptons environ 2 000 prêteurs pour 10 000 emprunteurs
- nous avons accordé pour 100 millions d’euros de crédits depuis notre lancement il y a 2 ans et demi (dont 40 millions d’euros de janvier à juillet 2014)
- Prêt d’Union est la première plateforme d’Europe continentale.
- A titre de comparaison, Lending club, le leader du prêt peer to peer aux Etats-Unis, octroie désormais 4 à 5 milliards de dollars de crédits par an.
- Nous visons un point mort sur l’activité en France fin 2015, sauf si nous sortons de l’hexagone pour attaquer des nouveaux marchés géographiques.

En quoi un service comme Prêt D’union disrupte-t-il la banque ?

La disruption est dans le modèle même de Prêt d’Union.

1ère disruption - un principe très simple : nous ne prêtons qu’à hauteur des fonds dont nous disposons. Nous respectons à la lettre l’esprit de la directive Bâle 3, règlement européen de sortie de crise qui contraint une banque à équilibrer montant des prêts octroyés et fonds à disposition.
Pour le dire autrement, si les banques avaient fonctionné comme Prêt d’Union, il n’y aurait pas eu de crise financière, puisque dans notre modèle de plateforme, ne sont prêtés aux emprunteurs que les montants investis par les investisseurs.

Les banques et institutions financières traditionnelles, gagnent au contraire de l’argent en empruntant sur le marché à court terme (1 à 3 mois) et en prêtant aux consommateurs à long terme (à plusieurs années).

Le problème, c’est quand les marchés financiers se ferment, on a alors la fameuse crise de liquidité.

2ème disruption : un circuit court de financement, nous n’avons pas d’agence et à la différence du monde bancaire traditionnel, qui en créant des systèmes compliqués, des fonds structurés,  créent en réalité d’énormes frictions à la fois opérationnelles et fonctionnelles. Ajoutez à cela une situation d’oligopole : les banques n’ont guère été incitées à innover jusqu’à maintenant.

3ème disruption : L’agilité de l’infrastructure technologique. Les banques ont été les premières grandes entreprises à s’informatiser. Du coup, elles ont une très lourde »dette technique », difficile pour elles de transformer leur techno rapidement. Leur système d’information repose sur de gros outils dépassés et très coûteux à maintenir. A titre d’exemple : le budget informatique annuel d’une grosse banque peut aller jusque 5 milliards d’euros !

Nous nous sommes lancés de zéro, sans dette technologique par définition. Nous avons été tout de suite web, mobile, tablettes. Nos coûts de back-office (traitement des flux, recouvrements, réconciliation prêts et emprunts), de middle-office, et de front-office (interface client) sont extrêmement bas. En fait, nous avons un seul système, simple et unifié.

4ème disruption : Le rôle clé de la smart data. L’essentiel de notre investissement ira à l’avenir dans le développement d’outils d’analyse data nous permettant de détecter encore plus facilement et de manière encore plus pertinente mauvais payeurs ou fraudeurs. Nous diminuons ainsi le risque et donc le coût.

Nos coûts de structure sont du coup beaucoup plus faibles que pour les banques.

Concrètement, quels bénéfices pour les utilisateurs ?

Au final, du côté de l’usage,

- l’emprunteur bénéficie d’un service plus simple, plus rapide et moins cher car Prêt d’Union n’a pas à répercuter sur les emprunteurs de la plateforme les mêmes coûts que les établissements traditionnels.
- le prêteur est rémunéré à des taux entre 4 et 5 %, un niveau très compétitif, dans un contexte où les livrets, et l’assurance-vie vont encore voir leur taux baisser.

Quelle relation avez-vous avec les banques ?

Nous ne sommes pas dans une position anti-banque et n’avons pas du tout vocation à les remplacer.
Nous ne faisons que du crédit et de l’épargne, et ne chercherons pas à nous diversifier (cartes bancaires, livrets…)
Nous pensons que pour l’écosystème bancaire, un modèle alternatif est une bonne chose.
Il est du reste intéressant de noter qu’aux Etats-Unis, Lending Club compte désormais parmi ses prêteurs… des banques ! Cela pourrait arriver en France en jour ou l’autre.

Qu’est-ce qui freine la disruption dans la banque ?

Il y a un principe de base dans les services financiers : la croissance ne doit jamais être trop rapide. On pourrait faire déjà 4 fois plus de volumes qu’actuellement (de fait, moins de 5 % des demandes de prêt sont financées), mais nous faisons nôtre le principe de sur-prudence, et en tant qu’entrepreneurs nous devons prendre sur nous pour refreiner notre enthousiasme et notre énergie de croissance. Comme les banques, nous gérons en effet des flux financiers.

De ce fait, les cycles de « test and learn » et d’appréhension du risque sont extrêmement longs, et c’est pour cela que le modèle bancaire a été l’un des derniers à se transformer.

Malgré cela, l’industrie bancaire aux Etats-Unis est clairement disruptée comme le prouvent les volumes de Lending Club et la perspective de sa très prochaine introduction en bourse.

Quelles sont les prochaines étapes ?

L’objectif est de continuer à grossir en France, et potentiellement en Europe, sachant que notre agrément peut se "passeporter" à tous les pays de l’Union Européenne !

Nous sommes de ce point de vue en constante discussion avec nos actionnaires, la future introduction en bourse de Lending Club étant une confirmation de la pertinence de notre modèle de plateforme.

L’introduction de Lending Club va avoir une autre conséquence : elle va évangéliser le marché et le public, lever les craintes liées à la nouveauté dans la banque, montrer que le business model du prêt peer to peer marche ! De nombreuses industries vont s’y ouvrir, avec en perspective des partenariats thématiques – Aux Etats-Unis, Lending Club fait du crédit auto pour Tesla !

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"Disruption(s) dans la banque", une série de trois articles:

1. Prêt d’Union, le spécialiste français du crédit entre particuliers

2. Comment le Crédit Agricole prend l’industrie bancaire à contre-pied

3. Comment Linxo révolutionne la gestion de votre argent

Lire aussi : Crowdfunding - la France bouleverse le monde de la finance